Chapitre VI : L’intervention des politiques et des Administrations 1985-2009.

                         

 

 

 

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I- Le coup de tonnerre politique : les lois de 1985 et 1987 et leurs conséquences.

 

A-  Les lois forestières

 

Le 4 Décembre 1985, la situation  avait évolué.

En effet la nouvelle loi sur la forêt[1], dans son Titre III, Article 13, modifiait l’article L224-3 du Code Forestier en précisant :



 « Les copropriétaires d’une forêt où s’exercent des droits d’usage peuvent décider d’affranchir cette forêt des droits d’usage au bois qui s’y exercent. Cette décision est prise par la moitié au moins des propriétaires représentant les 2/3 au moins de la surface ou par les 2/3 au moins des propriétaires représentant la moitié au moins de cette surface ».

          Ce texte était le résultat d’un amendement présenté au Sénat ; inspiré par le sénateur de la Gironde et Maire de Salles, Raymond Brun, il fut accepté par le ministre socialiste Souchon afin « de régler le cas  particulier de la forêt de la Teste », sans qu’il ait pris la peine d’informer les assemblées de la décision de la Cour de Cassation, qu’on leur demandait d’effacer, mais en précisant par contre que « les usagers, par des exigences diverses plus que par l’importance de leurs prélèvements rendent impossible une sylviculture normale au point que la forêt pourrait être ruinée dans dix ans » ! [2]



 

          Pourtant cela n’allait pas dans le sens souhaité par les ayant-pins  car ses services avaient mal rédigé le texte, parlant en effet de copropriétaires ce qui était inexact.

         Cette erreur, qu’ils mettront deux ans à réparer, explique peut-être l’allusion du Directeur du CRPF[3]


Cela explique aussi le mutisme dont cette affaire a été entourée sur le plan local, aucune information n’ayant été communiquée par les responsables municipaux à ce sujet ce qui conduit à se poser des questions soit sur leur volonté de s’opposer au cantonnement, soit sur leur capacité à savoir ce qui se tramait dans les bureaux parisiens et dans les assemblées, voire à Salles.... En effet depuis 1977 tous les élus régionaux, députés et sénateurs, avaient reçu des dossiers à ce sujet ; or la loi fut votée à l’unanimité !

 

            L’année 1986 se passa donc de façon routinière sans que cela ne soit abordé.

 

      Les problèmes des chênes dont les coupes «abusives »  furent condamnées par l’ADDU, celui du garde[4] dont le syndic des ayant-pins entendait être seul responsable (malgré une décision du tribunal d’Instance d’Arcachon) mais voulait cependant le faire prendre en charge financièrement par la Caisse syndicale, celui enfin de la vente des bois incendiés en 1984, furent les seuls à être évoqués.



      La seule tension entre associations et municipalité de La Teste concerna, le 19 Septembre 1986, la volonté de cette dernière de faire réaliser par le Conseil Général une route touristique Cazaux- Plages océanes, en utilisant la voie dite des pétroles et la piste dite de Maubruc alors que celle-ci venait d’être fermée au public par une décision commune des administrations (ONF, DDE, DDA, MIACA) qui la considéraient comme une piste de secours en cas d’incendie.

 

 Le 22 Juillet 1987 la loi de 1985 fut modifiée par la suppression de la mention de copropriétaires[5]


Cette modification fut insérée dans le chapitre III de la loi concernant, ce qui n’avait rien à voir, la défense de la forêt contre l’incendie !!!

 

B- La nouvelle demande de cantonnement

 

En conséquence, le 7 Novembre 1987 l’assemblée générale des  propriétaires   estimant regrouper 110 demandeurs (66%) et 3196 ha (87 %) fit une offre de cantonnement amiable laissant aux usagers 120 ha au lieu des 744 proposés dix ans plus tôt !

Cette superficie était calculée en fonction de la moyenne des prélèvements usagers depuis 1977 qui avait évidemment baissé non seulement à cause des changements dans les méthodes de  construction mais surtout à cause des freins permanents mis par les syndics ayant-pins à la délivrance du bois.

Mais il y avait  une autre raison : l’assemblée envisageait la possibilité d’aller plus loin mais précisait qu’au-delà de 360 ha il faudrait un remembrement ce que la plupart des futurs propriétaires ne seraient pas disposés à entreprendre, tandis qu’en dessous certains d’entre eux acceptaient de se défaire d’une partie de leurs biens.

Ce n’est que le 5 Décembre que la population fut informée de ce qui s’était passé par un article très documenté de Monsieur Jacques Ragot[6]


commençant par un titre percutant « La force injuste de la loi » et précisant, « cette formule est de Monsieur Mitterand, Président de la République. Il ne l’a pas employé à propos de la forêt usagère mais elle convient très bien à la loi du 4 décembre 1985 qui va être utilisée par les propriétaires pour faire supprimer les droits d’usage »

 

1-La réaction des usagers en direction des politiques.

 

Le 14 Janvier 1988 eut lieu l’Assemblée Générale de l’ADDU-FU.

En effet l’association avait élargi ses compétences statutaires devenant ainsi « Association de défense des droits d’usage et de la forêt usagère de La Teste ». Changement tout à fait légitime qui dans les faits se traduisit par une volonté d’exclure les autres partenaires associatifs locaux, c’est ainsi que leurs lettres étaient adressées directement au Président de la  Sepanso Gironde ce qui obligeait à des allers retours épistolaires inutiles entre les responsables bordelais et les membres locaux chargés du dossier mais désormais ignorés par l’ADDU-FU.

La SEPANSO  ne pouvait souscrire aux arguments qui étaient avancés par les nouveaux responsables de l’association ni à la connotation de plus en plus politique de certains propos ; on lisait ainsi dans un  de ses tracts: « Effets du cantonnement : près du lac de Cazaux, le long de la côte océane, possibilité d’urbaniser, source de fortune pour les spéculateurs, les lotisseurs ,les promoteurs » alors qu’en aucun point la forêt usagère ne jouxte la côte océane et que la forêt était, elle y avait veillé, classée depuis des années en site inscrit, en espace boisé classé à conserver et dotée d’un POS extrêmement contraignant,.

      C’est alors en direction des politiques (qui avaient voté cette loi…) que l’ADDU-FU engagea une campagne d’information relayée à l’Assemblée Nationale par le député Georges Hage (question du 11 Juillet 1988) [7]


agitant lui aussi le chiffon rouge de la « spéculation immobilière » et au Sénat par Marc Bœuf et Philippe Madrelle qui, n’insistant, de façon plus raisonnable, que sur  « l’aspect végétal particulier de ces forêts résultant du caractère particulier de leur statut juridique » proposèrent la suppression de l’article L 224-3 du code forestier.

      Bien que  l’ADDU-FU ait été reçue en audience au Sénat le 19 Octobre, tous les intervenants furent destinataires, de la même réponse[8]


du Ministre socialiste de l’Agriculture et de la Forêt, Henri Nallet, avançant  toujours les mêmes arguments : impossibilité de gérer faute d’accord et survie menacée à long terme (et non plus dans dix ans comme l’avait dit son prédécesseur). Mais il refusait toujours de changer la loi tout en  précisant que « la préoccupation constante de l’administration est de faciliter l’émergence d’un accord et qu’à défaut, le cantonnement serait un moyen d’assurer la gestion et donc la survie de cette forêt » promettant qu’une « attention toute particulière sera apportée à l’examen des plans de gestion  proposés par les propriétaires… » afin qu’ils « répondent à la fois aux objectifs de protection d’un milieu naturel assez exceptionnel et de production de bois tout en assurant la pérennité de cette forêt (régénération, défense contre l’incendie) »

Cet exercice de style, tout en nuances, lui permettait d’évacuer le problème sans se renier, de donner un satisfecit à ses services, mais ne masquait pas leur choix à savoir le cantonnement.

 

C’était donc de nouveau l’échec.

 

2-La dernière tentative de la SEPANSO pour un compromis

 

Face à cette situation, la SEPANSO, décida, au mois de Février 1989, de tenter encore une fois la solution du compromis en réactualisant et en diffusant largement ses propositions de 1984 qui, pour les raisons que j’ai expliquées plus haut, n’avaient pas franchi le stade de la Commission Municipale .

Pendant que ce travail était préparé, l’ADDU-FU,  proposa, le 2 Mars 1989, lors d’une entrevue au Ministère de l’Agriculture sollicitée par le Conseil Général de la Gironde, son propre plan de gestion. Cela n’avait rien à voir avec les  propositions antérieures du SRAF, de la DDA, du CRPF, ce qui était logique, ni avec celles de la Mairie de 1980, ni bien entendu avec les études de la SEPANSO de  1979 et ses propositions de  1984.

Ce projet de gestion envoyé au Ministre, exprimait d’abord, d’après les « extraits » qui lui furent communiqués plus tard, deux préalables difficiles à obtenir étant donné ce qui venait de se passer :

-la suppression des modifications apportées au Code Forestier en 1987 à propos du cantonnement, et donc l’impossibilité de cantonner,

-la suppression des plans simples de gestion.

Il proposait ensuite une régénération adaptée à la spécificité de la forêt avec dans l’immédiat l’abattage de « tous les arbres morts, vieux et malades »afin d’obtenir « une entrée d’argent permettant de  faire face aux frais d’entretien ». Outre le fait que les frais d’exploitation de ces arbres disséminés dans toute la forêt  risquaient de dépasser le produit escompté, on pouvait s’interroger sur le terme de « vieux » : les pins bouteilles ? les pins bornes ? et de « malades » étant donné le nombre très élevé d’ arbres champignonnés.

Une fois cet « assainissement » réalisé, la mise en place d’un plan d’aménagement et de conservation de la forêt était envisagée prévoyant des « ventes de bois afin de permettre un revenu indispensable pour atteindre les buts fixés ».

En ce qui concerne l’argent, il était précisé que tout serait versé à la Caisse syndicale « pour l’entretien et la régénération » et « qu’alors seulement  le reliquat éventuel sera partagé entre les parties prenantes ».

En ce qui concernait la gestion et l’administration de la forêt, il prévoyait la mise en place d’un conseil d’administration où ne siègeraient que « les parties prenantes reconnues par la justice : usagers représentés par les communes, propriétaires ayant-pins » et ADDU-FU « dont les statuts, précis et immuables, seront la garantie du maintien des droits d’usage et de la défense de la forêt »

Ainsi s’exprimait la volonté de hisser une simple association, dont la représentativité avait été parfois refusée par les tribunaux, au rang de partenaire officiel et définitif de la gestion et d’en exclure tout autre qu’il soit administratif ou associatif.

 En ce qui concerne la SEPANSO, qui depuis 1969 et bien seule au début, s’était mobilisée pour la défense de cette forêt, le président de l’ADDU-FU fut, lors d’une réunion publique tenue sur la place de la Mairie en Juillet 1989, encore plus net puisqu’il déclara devant 300 personnes « La SEPANSO doit se contenter de s’occuper des petits oiseaux » ! [9]



 

L’ADDU-FU avait d’ailleurs été agréée  comme association communale (23 Mai 1989) et le 9 Octobre 1991 elle le fut avec une aire d’intervention  intercommunale.

 

              Pendant ce temps, le 19 Mars, une nouvelle municipalité avait été élue à La Teste.

 

             Le 24 Mars 1989,  la SEPANSO qui, à cette date ne connaissait pas la démarche de l’ADDU, envoya son nouveau plan qui reprenait en grande partie celui de 1984, il était accompagné d’une lettre dans laquelle il était rappelé que

« Notre association se préoccupe depuis longtemps du sort de la Forêt Usagère de La Teste et en 1978 1e Ministère de l'Environnement et la MIACA nous ont confié l'étude écologique et économique du massif forestier; ce rapport a été remis en 1979.

Dès qu'a commencé la procédure de cantonnement nous avons proposé un compromis entre les usagers et les propriétaires, ces derniers l'ont refusé, persuadés qu'ils étaient de gagner leur procès.

Dès lors nous n'avons cessé dans toutes les instances communales, départementales et nationales, de mettre en avant l’intérêt de la forêt et de faire prévaloir le bon sens. Cette attitude, la connaissance historique et juridique que nous avions du sujet, le fait que, vivant sur place, nous avions une bonne perception de la psychologie locale, tout cela nous a certes conduits à refuser le cantonnement que nous jugions impossible (la cour de Cassation nous a donné raison) et l'application de la loi de 1963 que nous savions incompatible avec les textes et les mentalités du pays (les faits nous ont là aussi donné raison). En 1984, les propriétaires ayant perdu sur l'un et l'autre point, nous avons alors proposé un plan de gestion (synthèse des propositions du SRAF, de la DDA et de la SEPANSO) et une transaction qui devaient permettre :

- de donner des revenus légitimes aux propriétaires car le statut usager a toujours comporté une contre partie, actuellement disparue, la jouissance des produits résineux.

- de maintenir l'usage en le disciplinant car la façon dont il est pratiqué est à l'opposé de toute saine gestion.

-de régénérer la forêt en conciliant les impératifs économiques et la nécessité de maintenir un paysage exceptionnel………...

Depuis, le Parlement a modifié la loi et facilité ainsi le cantonnement judiciaire donnant à l'une des parties ce que la plus haute juridiction française venait de lui refuser. Nous en prenons acte, n'ayant pas vocation à intervenir sur ces problèmes de propriété; seul nous préoccupe l'intérêt de la forêt. Or nous sommes toujours aussi inquiets! En effet :

- la procédure judiciaire (instance- appel- accord des parties- expertise- remembrement) pour le cantonnement de la forêt usagère de Biscarosse a déjà duré 14 ans. Or elle était 4 fois plus petite (moins de 1000 hectares), les parties se sont rapidement mises d'accord et la structure foncière était  beaucoup plus simple.

-à La Teste il y a eu déjà 12 ans de conflits, les oppositions sont de plus en plus dures et en plus la procédure recommence. Si elle dure autant qu'à Biscarosse où cela s'est bien passé... cela fera 26 ans!!! Pendant ce temps la forêt reste à l'abandon !

-de plus la perspective du cantonnement risque d'exacerber encore plus les passions (car on ne peut supprimer impunément des droits d'usage vieux de 6 siècles que même la Révolution Française a confirmés); or la forêt risque d'en faire les frais car les dégradations et le pillage seront impossibles à éviter.

Dans ces conditions nous continuons à vouloir croire à la sagesse et nous proposons à tous le plan de gestion et la transaction ci-annexés.

Ces accords seront provisoires, pour un délai d'au moins 12 ans au bout duquel, si la législation est toujours la même, le cantonnement amiable serait, en cas d'échec, automatiquement entrepris.

Cette solution, permettrait de commencer la régénération indispensable de la forêt, de donner immédiatement des revenus aux propriétaires, de ramener le calme et peut-être de sauver ce patrimoine grâce à la concertation sous arbitrage que nous proposons. Tout cela sans fermer la porte à un divorce à l'amiable donc rapide dans un délai semblable à celui prévisible du divorce judiciaire.

Nous voulons espérer que nos propositions seront lues et analysées attentivement …….que vous nous ferez part de vos observations et qu'un jour prochain nous nous retrouverons tous (propriétaires, municipalités, représentants de l'Etat, associations) autour d'une table pour parler d'abord de la forêt, et accepter une solution apte à faire évoluer sans passions et sans risques la situation anarchique dans laquelle elle est plongée. »

 

Ce document proposait donc un plan de régénération et une nouvelle transaction.

Le plan de gestion globale reprenait l’idée de séries appuyées sur le relief et non sur le parcellaire cadastral :

 

1° série : 990 hectares de surfaces planes dont 535 hectares de semis de Cazaux.

   «     :1480 hectares de dunes paraboliques avec des  pentes<5%         

   «     :250 hectares d’aulnaie-saussaie et de zones humides

   «     :330 hectares de pentes fortes >35% + la réserve de chasse de l’AICA (500 ha)

 

    Auxquelles s’ajoutaient  25 ha  de surfaces en eau et 138 hectares de clairières

 

Selon les séries la taille des coupes, sur semis acquis, changeait ; le sous bois était protégé entre 12 et 32 ans après la coupe et la pénétration dans les parcelles en régénération interdite pendant les 3 premières années.

Les sentiers de grande randonnée, les sentiers équestres et piétonniers étaient entretenus dans le cadre d’une convention passée entre les communes et les propriétaires selon les termes de l’article L 130/5 du code d’urbanisme. Celui-ci, en échange de l’ouverture au public, permet en effet aux communes de prendre en charge l’entretien des massifs concernés.

Quant aux pistes cyclables, il était envisagé de remettre en service celles qui existaient dans le passé.

Un paragraphe concernait la nouvelle Association de chasse intercommunale (AICA) dont les limites de la  réserve devaient être précisées et dont la pérennité du territoire était garantie par l’interdiction de supprimer le droit de chasse dans les propriétés de plus de 20 hectares.

 

Le projet de transaction avait pour volonté de fixer des règles destinées à permettre l’exercice de l’usage sans compromettre la régénération : ainsi était-il préconisé un système dans lequel le bois ne pourrait être pris gratuitement que dans les parcelles en régénération (sauf pour les « pins de pinasse ») ce qui supposait un dépôt des devis importants à des dates régulières afin qu’ils puissent être pris en compte par le gestionnaire dans les plans de coupe ; il en était de même pour le chêne dont la délivrance serait autorisée pour le chauffage moyennant une redevance ne pouvant être supérieure au I/6° du prix du bois marchand. Il était aussi prévu le stockage des grumes usagères dans un parc fermé où l’usager pourrait venir les prendre et pour éviter les fraudes la délivrance par les syndics d’une carte d’usager.

Sur le plan financier, la nécessité de fournir aux ayant-pins des revenus compensatoires à la perte de la gemme et de couvrir les charges en personnel de la caisse syndicale (un gestionnaire-comptable et un garde-sylviculteur) il était envisagé, outre les cotisations normales des propriétaires et des communes, des participations matérielles ou financières des 2 collectivités locales intéressées:

-mise à disposition par la commune de La Teste de la scierie communale qu’elle venait de créer et signature d’une convention d’ouverture au public,

-avance de fonds correspondant à 3 mois de fonctionnement par celle de Gujan.

La répartition des fonds était prévue tous les 3 ans selon les règles de 1917 assorties de la fixation d’un minimum pour les ayant-pins et d’un système permettant, au cas où ce minimum ne serait pas atteint, de réduire la part des communes, de faire appel à des subventions des autres collectivités (Etat, Région, Département) et de rétablir, en dernier ressort, une taxe sur le bois délivré.

Il était aussi prévu la possibilité de réintroduire le gemmage soit à l’initiative de tel ou tel propriétaire et pour son compte, soit, selon la conjoncture, à celle du Conseil de la Montagne sur toute la superficie au profit alors de la Caisse syndicale.

L’administration de la forêt était confiée à 4 syndics, désignés pour 6 ans selon les règles habituelles dont les décisions devraient être unanimes avec en cas de désaccord un organisme dit Conseil de la Montagne, décidant à la majorité des 2/3, composé de 10 membres titulaires : 4 représentants de La Teste et Gujan, 4 des  propriétaires , et 2 administratifs (Ministère de l’environnement et de l’Agriculture) et de 5 membres consultatifs permanents (communes d’Arcachon et de Lège, ADDU-FU, SEPANSO et AICA)

Ce projet était, comme déjà dit, prévu pour au moins 12 ans au terme desquels chaque partie pouvait le dénoncer et si le Conseil de la Montagne unanime constatait alors qu’il n’y avait pas d’autre solution, la procédure de cantonnement amiable serait déclenchée, chacun restant libre en cas de désaccord sur les propositions d’aller devant les tribunaux.

 

Cette attitude consistant à rapprocher des points de vue  antagonistes  conduisait de nouveau la SEPANSO à proposer des solutions de gestion très éloignées du "strict" intérêt écologique qui aurait été de conserver, sur un espace plus réduit que l'actuel massif, une réserve biologique où la forêt aurait pu évoluer à l'abri de toute atteinte. Solution qu’elle avait toujours dit vouloir préconiser en cas d'impossibilité de garder le statut usager.

 

Comme l’écrivit le Président du Conseil Général, Philippe Madrelle[10]


 « le dossier que vous avez établi sur cet épineux problème me semble pouvoir constituer une base de réflexion opérante, pour autant que les parties concernées dans cette affaire veuillent bien s’acheminer vers un compromis raisonnable. Je ne suis malheureusement pas certain que cela reflète leur état d’esprit actuel »

 

Quant à l’administration centrale, elle se contenta d’envoyer, en Juin, un Ingénieur  général, chargé de contacter les différentes parties prenantes mais cette démarche ne put cacher qu’elle était bien décidée à attendre le cantonnement judiciaire.

Quand le représentant local de la SEPANSO le rencontra, il lui résuma de la façon suivante  la position de son ministère :

             « 0 : milieu naturel remarquable

                     1 : situation affligeante d’abandon

                     2 : gestionnaire

                     3 : contraintes de gestion

                     4 : aménagement »

 

Par « gestionnaire », le ministère privilégiait le cantonnement estimant depuis toujours que ses interlocuteurs ne pouvaient être que des propriétaires libres de gérer et faisant de cette décision judiciaire attendue un préalable incontournable. 

Juillet fut d’ailleurs un mois chaud, l’ADDU-FU organisant en début du mois une manifestation publique prolongée par  une opération escargot sur les voies d’accès mais cela n’eut aucun effet ni d’ailleurs les démarches de nouveau entreprises auprès de chaque député au mois d’Octobre.

 

II-La nouvelle municipalité, 1989-2001.

 

A- la fin des scieries.

 

L’élection de la nouvelle municipalité provoqua de la part d’un propriétaire une opération de débroussaillage (c’était toujours la même tactique utilisée depuis 1978 : tester l’adversaire et voir jusqu’où on peut aller). Dans le même temps, pour les besoins du tournage d’un film, était prévue la construction d’un pavillon sur la parcelle de Lartigon et comme l’attitude de la municipalité en laissait plus d’un perplexe, c’est dans la rue que certains estimèrent devoir poser les problèmes : c’est ainsi que le 18 Mai 1990 lors d’une manifestation de l’ADDU-FU, la foule fut, selon le rapport établi par le chef de la police municipale[11], invitée à « occuper la Mairie » et que des échauffourées s’ensuivirent.

 


Il fallut en effet attendre le 20 Novembre pour que  cette nouvelle municipalité, élue le 13 Mars 1989, invite la SEPANSO, dont elle avait accepté la participation aux réunions pouvant  l’intéresser  dans le cadre de ses « attributions statutaires », à une réunion de la commission de la forêt usagère.


12 [12]


 

Il y fut surtout question de la fermeture de la scierie municipale (en 1989, la mairie avait en effet loué les installations de la scierie Condou) dont le bilan financier était négatif.

 S’appuyant sur une circulaire ministérielle, la municipalité voulait que le budget 1990 soit, sans subvention municipale, en équilibre. Or au 23 Août, le bilan, depuis le début de la prise en charge, faisait apparaître un déficit cumulé de 189.592,72 francs. De plus le scieur avait démissionné au début septembre. La proposition faite par l’ADDU-FU [13] de mettre à la disposition d’un scieur, auquel elle avancerait 60000 francs, un terrain municipal, le matériel actuel et un bâtiment neuf construit par la commune et remboursable en 20 ans, serait, dit le Maire, « mis à l’étude »… mais on en resta là.


 

A partir de cette époque il n’y eut plus de scierie et pratiquement plus de délivrance de bois puisque celui-ci ne pouvait être transporté hors du Captalat même pour être débité.

Ainsi, l’application des transactions et même la possibilité pour un usager de passer outre à l’opposition des syndics en coupant, selon une procédure précise prévue en 1759, chez un propriétaire de son choix, était rendue impossible par l’inexistence d’une scierie sur le territoire de l’ancien Captalat. C’est ce que confirma la Cour de Cassation dans un jugement rendu le 1 Avril 1999 suite à un conflit entre 3 usagers qui étaient dans ce cas, et le syndic gujanais des ayant-pins.

Ces usagers, qui avaient appliqué ce texte mais fait scier au Teich, avaient été accusés de vol de bois (20 Mars 1993) et la plainte avait été classée sans suite (7 Mai 1993). S’estimant diffamés, ils avaient à leur tour porté plainte mais la Cour d’Appel les avaient déboutés estimant entre autres « que la transaction de 1759 était abrogée en ce qu’elle ne pouvait plus être respectée faute d’une scierie sur le territoire de la commune de La Teste ». C’est cet argument que reprit la Cour de Cassation[14] en les déboutant à nouveau.


 

La seule solution (qui sera plus tard épisodiquement utilisée) était de louer une scierie mobile.

Pour l’anecdote, on peut noter que les premiers projets de scierie municipale furent avancés par les socialistes testerins en …1924/25 puis de nouveau en Conseil Municipal le 31 Octobre 1944 !

 

Quant au cantonnement il faisait son chemin, les syndics des propriétaires  multipliant les appels auprès de leurs mandants  pour obtenir les signatures nécessaires leur expliquant dans leur appel N°4 que «  le cantonnement est désormais inéluctable »et, dans le N°5, que :

« Les syndics n’ont plus délivré de bois depuis Juillet 1989,  l’usine municipale avait un déficit,  les usagers ne demandaient plus que 5 m3 par mois, ainsi se tourne une page d’histoire de notre forêt » et leur demandant de transmettre leurs titres de propriété « pour dégager vos propriétés du principe de la servitude, pour conserver votre héritage, pour gérer la forêt, pour réparer les dégâts dus à l’incohérence de l’usage ».


15[15]


 

 

Face à ce prochain déclenchement de la procédure quelle était la  position de la municipalité ?

La question fut évoquée le 20 Novembre en commission de la forêt : les deux avocats de la commune, considérant

-que la loi nouvelle ne permettait pas de s’opposer au cantonnement,

-que la procédure était difficile à bloquer plus d’un an (c’était il y a …17 ans !!!),

- que les efforts en direction des élus pour faire modifier la loi n’avaient pas abouti,

s’interrogèrent sur le fait de savoir s’il ne valait pas mieux , plutôt que de tout perdre, prévoir d’autres possibilités… Mais les engagements électoraux de la nouvelle équipe municipale « pour le maintien des droits ancestraux en forêt usagère » empêchaient d’interrompre unilatéralement le « combat » judiciaire.

         C’est donc toujours sur la contestation du principe du cantonnement mais surtout  sur la vérification des titres de propriété des demandeurs que se porteront désormais les efforts et aucune  autre action n’étant envisagée, la commune se contentera désormais de mettre en avant la nécessité  d’attendre la fin de la procédure judiciaire en cours sans rien tenter de plus et d’opposer cette nécessité aux sollicitations pressantes du Maire de Gujan.

Ainsi, quand, le 5 Août, celui-ci, transmettant la délibération de son conseil sur le cantonnement amiable, propose à son homologue testerin une transaction avec les demandeurs du cantonnement, il lui est répondu qu’il faut attendre la fin des procédures en cours.


16[16]


 

 

B- Le cantonnement amiable de Gujan (1983-2002)

 

Cela faisait plusieurs années que le maire de Gujan préparait un cantonnement amiable.

Un premier protocole d’accord, antérieur à …1983, prévoyait

-que les droits d’usage des gujanais seraient  éteints définitivement lorsque la commune  entrerait en possession des parcelles qui lui auraient été dévolues,

-que le droit de chasse et le droit de libre parcours sur l’ensemble du massif serait maintenu,

-que, s’il n’y avait pas de cantonnement avec La Teste, l’ensemble de la forêt y compris les parcelles attribuées à Gujan continueraient à être grevée de droits au seul profit des usagers testerins.

- que la commune de Gujan s’engageait à ne pas échanger, avant le cantonnement de La Teste, les parcelles qu’elle détenait avec celles que possédait La Teste sur le territoire de Gujan.

Il s’agissait des 154 hectares 40 ares et 56 centiares du domaine de Césarée dont la SEPANSO avait, dès le début, préconisé l’échange. Mais cette clause disparut des protocoles ultérieurs car cet échange était aussi envisagé par certains élus gujanais. C’est ainsi que, le 7 Octobre 1993, en Commission municipale de la Forêt de Gujan[17],en présence du syndic gujanais des ayant-pins,  fut rappelé par l’adjoint au Maire que « le but à terme est d’échanger ces parcelles avec La Teste qui en contrepartie rendra les parcelles qu’elle compte à Gujan »


L’année suivante, lors d’une réunion publique, le Maire confirmait ce choix[18].


 


Or c’est, en 1989, le commencement de la procédure de classement du site qui va accélérer le processus.

 

Dès 1990, le 27 Décembre, le syndic des propriétaires  propose à Gujan 12% en toute propriété. Cela est renouvelé, le 9 janvier 1991, avec 25% pour les deux communes, et, le 11 Mars, est présenté  au Conseil Municipal un projet de délibération autorisant le Maire à engager, sur ces bases, et « dans toute la mesure du possible de concert avec la municipalité de La Teste » des négociations en vue d’un accord amiable garantissant

-« la pérennité des droits d’usage sur les parcelles dévolues aux communes »,

- la pérennité du droit de chasse »,

- la sauvegarde du massif forestier et la préservation de l’environnement »

en précisant « les décisions et règlements administratifs apportant des garanties formelles contre les abus notamment en matière d’urbanisme » [19].



En Mai 1991, dans « Les Nouvelles de Gujan », le maire insiste sur la survivance des droits, usage, chasse, promenade  et sur « la régénération écologique de la forêt en situation de pourrissement »

         

 Cette volonté de rétablir ensuite  les droits d’usage sur les parcelles dévolues à la commune se heurtait cependant à quelques obstacles :

 

-le cantonnement abolit juridiquement les droits d’usage (Cour d’Appel),

- aucune convention ne peut être établie sur un site classé sans l’accord du Ministre (Code de l’Environnement, or le site sera classé en 1994)

-et surtout, toute concession de droits d’usage est interdite dans les bois et forêts relevant ou non du régime forestier (Code forestier).

 

Malgré cela, le 21 Juillet1992,  le Conseil Municipal adopta le projet

définitif qui fut signé avec les  propriétaires  le 7 Avril 1993. [20]



Conformément au premier vote et aux promesses du Maire, il accordait un bail de chasse de 25 ans sur la totalité du massif pour la somme symbolique de 1 franc par an et prévoyait que la Ville de Gujan s’engagerait à permettre sur ses parcelles l’exercice de l’usage.

Mais il  ne parlait ni du libre parcours sur l’ensemble du massif, ni de la défense de l’environnement et ajoutait à la suppression des droits d’usage en bois celle des autres droits comme le  glandage ( alors que La Teste venait de demander au tribunal de tenir compte de tous ces autres droits…), et excluait du délaissement les cabanes avec autour de chacune un périmètre de 2 hectares.

De plus, il obligeait Gujan à s’associer, en tant que nouveau propriétaire, à la demande de cantonnement contre  La Teste et à s’opposer au classement du massif.

                                                                                                                                                         les parcelles devant devenir « gujanaises »(R.Aufan)  

 

Enfin, contrairement aux premiers projets de 1978, entérinés par le Tribunal qui avait émis cette possibilité si les parties en étaient d’accord, il n’était plus question de parcelles d’un seul tenant mais d’un certain nombre de micro parcelles, cédées par 36 propriétaires, pour un total de 501 hectares. 301 hectares, soit 60 % de la dévolution totale, devant être cédés immédiatement[21] ; ceux-ci  étant éparpillés sur tout le massif ce qui comme l’écrivit, le 10 Mars 1995, le Maire de Gujan Mestras[22] en réponse à un article de l’ADDU-FU. « pose un problème sans doute difficile à résoudre » mais qui « se fera au prix d’une  signalisation et d’une communication rigoureuse » !


La carte ci dessus montre que, dans la pratique, ce sera un casse tête : les habitants de Gujan, à condition qu’ils restent usagers, devront se livrer à un véritable jeu de pistes compliqué par le fait qu’il s’agit très souvent de morceaux de parcelles qu’il faudra donc délimiter ( pas par des clôtures car, outre qu’elles sont interdites, les usagers testerins doivent y conserver leurs droits)! Quant aux frais, il n’était pas prévu qui paierait pour que les limites soient matérialisées sur le terrain.

Dès Octobre 1993 les premiers actes notariés furent signés[23] et le 10 Janvier 1994, le Tribunal de Grande Instance statuant sur la demande de cantonnement général « donne acte à la commune de Gujan de la Transaction intervenue le 7 Avril 1993, mettant fin au litige en ce qui la concerne » ce qui ne signifiait pas une approbation de cet accord puisque le tribunal n’était pas saisi de cela, mais simplement la constatation du retrait de Gujan.


 

 

La municipalité de La Teste ne réagit point, alors que c’était à elle de le faire, quant à l’ADDU-FU, ce n’est qu’en 1995[24], qu’elle assigna devant le Tribunal de Grande Instance de Bordeaux, le Maire de Gujan et les responsables des  propriétaires.

 Le 9 Mars 1999, le tribunal la déclara irrecevable, car c’est à la commune de représenter les usagers, et l’association fit appel ; mais, pour la même raison, elle perdit son procès le 8 Avril 2002.


 

C- Le classement du site 1990-1994

 

L’autre grande affaire fut celle du classement du site.

 

Après un séminaire de formation des Inspecteurs des sites, qui,  le 27 Novembre 1989 avaient été reçus par la municipalité et avaient visité le grand site National de la Dune du Pyla[25], l’Administration des Sites, s’inquiéta de l’avenir et des projets touristiques envisagés dans le cadre de la révision du Schéma Directeur d’Aménagement et d’Urbanisme.


Au vu de ces orientations, elle engagea le  15 Janvier 1990, une procédure de classement du domaine forestier testerin, dont la forêt usagère déjà inscrite à l’inventaire depuis 1978. Cela fut approuvé, le 14 Mai par la Commission départementale des sites et l’enquête administrative publique fut décidée par le Préfet le 27 Septembre. Elle n’eut pas lieu, le Maire de La Teste, n’étant pas d’accord sur le périmètre, s’y refusa obligeant le Préfet à prendre un deuxième arrêté et à l’organiser du 17 Décembre au 15 Janvier. [26]


 


Ce projet de classement fut défendu par la SEPANSO, il le fut aussi  par l’ADDU-FU (sous réserve du maintien de l’usage et de la chasse) [27]



Il fut combattu énergiquement par le syndicat des sylviculteurs et par les plus actifs des propriétaires de la forêt (sur 537  propriétaires de parcelles concernés, 107 s’y opposèrent)

 mais aussi par le président de l’ACCA (chasseurs)et par la Mairie de La Teste qui ressortit le vieux projet, alors inapplicable, de « forêt de protection ».

 

Le 16 Janvier 1991, lors d’une réunion entre la Mairie, la DRAE, l’ONF et la  DDA , le Maire déclara que le « classement  est un obstacle aux projets d’urbanisme de la commune » [28], ce qui, pour la partie non usagère était exact :

 la carte ci-contre montre, en effet, l’extension prévue, au

nord (1), des zones urbaines dans des « espaces boisés

 classés à conserver » et inscrits à l’inventaire des sites et, dans le sud (3), les projets de golf[29]




 

R.Aufan. Carte établie d’après le Schéma approuvé par le SIBA (Syndicat Intercommunal du Bassin d’Arcachon) le 10 Juillet 1992,

(Seule la route prévue antérieurement entre La Teste et la Dune sera réalisé).

 

Lors de cette réunion il fut par contre question du classement de la FU la discussion portant sur le choix : forêt de protection que souhaitait la Mairie estimant qu’il « garantissait l’usage et la chasse », ou classement.

 

 Le 31.01.1991, le président de l’Association (des propriétaires) pour la sauvegarde de la forêt usagère, écrivit au Maire de La Teste pour  lui rappeler l’offre amiable, soit 25% de la superficie pour La Teste et Gujan, et préciser que cette proposition qui permettrait «u n gain de temps dans la mise en exploitation » serait caduque au 15 Septembre s’il n’y avait pas d’accord d’ici là, après quoi la justice trancherait[99].



      Dans le même temps, le 13 Mai, il écrivit au président des chasseurs, pour répondre à sa proposition de signer un bail de 24 ans à compter du 31 Mars et lui signaler que ce n’est que dans le cadre d’un cantonnement amiable avec La Teste que les propriétaires pourraient garantir aux chasseurs testerins un bail de longue durée. Il insistait sur les dangers du classement qui entraînerait « la création obligatoire de réserves écologiques et la suppression définitive du droit de chasse  »…(en 2007, la chasse est toujours pratiquée avec  un bail annuel renouvelable…).

Cette proposition conditionnelle fut confirmée par l’assemblée des propriétaires qui proposa un bail de 24 ans ; elle entérina d’autre part le cantonnement amiable avec Gujan, proposant 60 hectares à La Teste (!), souhaita l’application du plan de gestion du SRAF et s’opposa au classement soulignant la nécessité d’une négociation car « le classement et le cantonnement judiciaire fermeraient la porte à la sauvegarde des intérêts des usagers et des propriétaires »

 

Malgré cette agitation et cette surenchère (on entendit même que le classement allait mettre en péril la production forestière nationale !), la Commission départementale des sites l’approuva le 13 Juin, puis ce fut le tour de la Commission supérieure des Sites (31 Octobre) et du Conseil d’Etat (23 Novembre 1993) ; le décret fut signé le 28 Juin 1994[100]


 

Le Maire de La Teste, dans une requête commune avec les syndics des « ayant-pins » ( !) auxquels s’étaient associés  d’autres propriétaires de forêts non usagère, tentèrent d’en obtenir l’annulation, mais leur requête fut rejetée par le Conseil d’Etat le 13 Juin 1997.

 

Il ne restait plus désormais qu’à …régénérer la forêt  dont 20 ans de conflits n’avait pas amélioré l’état mais il fallait désormais tenir compte du classement ce qui interdisait de fait tous les traitements mutilants du paysage (coupes rases…..).

La responsabilité était désormais dans les mains du Ministère de l’Environnement et de la Direction Régionale de l’Environnement placée sous l’autorité de la Préfecture.

Du Captalat (La Teste, Gujan, Arcachon, Lège)  le pouvoir était désormais transféré à Bordeaux voire à Paris.

 

 

 

 

D-Le comité de gestion et son échec 1995-1998

 

C’est pourquoi, dès 1995, le Sous Préfet de Bordeaux fut chargé d’installer un Comité de Gestion.

La Société Historique et Archéologique du Pays de Buch, dont je faisais partie, ayant posé ma candidature[32], je fus de nouveau officiellement associé aux évènements.

 



1-   Les objectifs préfectoraux.

 

Le Préfet de la Gironde envoya donc à tous les participants une « Note générale sur le  Comité technique d’orientation de gestion du site classé de la dune du Pilat et de la forêt[33]»



Il précisait bien que ce comité n’était pas prévu par les textes légaux mais que sa nécessité se faisait sentir et qu’il « permettra d’évoquer l’ensemble des pratiques se déroulant sur le site et ne relevant pas de la législation »  (loi du 2 Mai 1930)

Il formulait ensuite ses buts, en particulier d’éclairer la commission départementale des sites et de « proposer des principes de prescriptions générales pouvant être envisagées pour les opérations modifiant l’aspect des lieux »

Il proposait pour cela une « réflexion à moyen terme sur la rédaction d’un cahier de gestion…visant à assurer la pérennisation de la gestion équilibrée du site et sa valorisation »…l’examen des « activités et usages existants et futurs…pour déterminer les meilleures conditions de leur pérennisation, de leur évolution ou de leur développement compatibles avec la préservation des qualités du site ayant conduit à sa protection. Un équilibre harmonieux entre critères esthétiques et critères socio-économiques sera recherché »

C e comité, destiné à régler en commun des problèmes concrets, était caractérisé par une grande souplesse et sa composition un peu lourde, 18 personnes, pouvait être allégée par la création de commissions.

A noter que le Maire de Gujan n’avait pas été  invité ce qui montrait que l’Administration prenait en compte sa  procédure de cantonnement amiable…

 

2-   Les demandes des syndics et la réponse de la DIREN

 

Sa création  était d’autant plus indispensable que le 10 décembre 1996, 4 syndics (deux ayant-pins + 2 usagers :le titulaire et le suppléant de La Teste) et le Président du Syndicat des propriétaires avaient décidé d’engager des actions de nettoyage des zones de mortalité, de dépressage et d’éclaircissage dans la forêt.

 Cette décision illégale tant par la qualité des signataires (absence du syndic des usagers de Gujan, participation d’un Président des propriétaires ne représentant que les cantonnants) que par l’absence de textes les mandatant pour cela, était à double détente puisqu’il s’agissait de tester l’Administration mais aussi de compromettre le syndic des usagers testerins chargé « d’identifier les travaux les plus urgents ».

La démarche reprit en 1997 sous la forme d’une sollicitation, par les propriétaires, de la DIREN[34] pour savoir qu’elles étaient les possibilités de travaux dans la forêt en particulier sur la mise en place de zones-tests destinées à expérimenter divers types de gestion.



Ces zones furent ensuite définies par les mêmes participants qu’à la réunion de décembre 1996 auxquels s’était joint le Maire adjoint de La Teste responsable de la commission des activités traditionnelles, pourtant chargé de faire respecter les textes… ! [35]


 


Il s’agissait de pratiquer, sur 6 parcelles, différentes éclaircies, des coupes sanitaires et surtout des travaux de dépressage, donc de coupe d’arbres, sur celle de Batlongue.

           Or des travaux de « débroussaillement »y avaient été entrepris,  La DIREN en effet avait dit, le 26 Juin, que ce n’était pas contraire au classement  s’agissant de l’entretien courant, mais que par contre, en l’absence de plan simple de gestion approuvé par la Commission Départementale des Sites, les travaux de coupe et d’abattage d’arbres étaient soumis à autorisation.

Dans le projet expérimental, il était d’ailleurs précisé, par les syndics, que  les  propriétaires  de chaque parcelle « devront demander les autorisations d’abattage ».

Malgré cette mise en garde, rappelée le 30 Mai par les deux syndics ayant-pins, le propriétaire avait continué, ce que constata, le 20 Juin, un huissier.

            Ces travaux furent condamnés par un référé du Tribunal de Grande Instance, le 17 septembre 1997, au motif qu’il fallait l’autorisation des quatre syndics. Il faut rappeler que ce nombre de 4 désigne les syndics titulaires prévus par les transactions, à savoir 2 ayant-pins et 2 usagers de La Teste et de Gujan, et personne d’autre.

             L e propriétaire fit appel (7 Janvier 1998). L’affaire fut jugée le 9 Décembre 1999 et la Cour débouta le plaignant tout en réformant le premier jugement : elle distinguait en effet « les opérations d’abattage des arbres » qui restaient interdites et « les opérations de débroussaillement » qui étaient autorisées « à charge de respecter   les modalités fixées par les syndics » puisque ceux-ci en avaient décidé le principe.

 

              La commune de La Teste ne s’était d’ailleurs pas portée en justice, seule l’ADDU-FU avait réagi et comme l’indiqua la Cour d’Appel à la suite du Tribunal d’Instance, celle-ci était, dans ce cas là, tout à fait recevable, puisqu’elle demandait le respect des textes.

 

              

3-   Les négociations avec les  propriétaires  et le projet d’accord.

 

            Pendant ce temps j’avais repris le flambeau pour essayer de faire réussir le Comité de Gestion. La DIREN avait, en effet, conseillé aux  propriétaires  de consulter un expert forestier. Contrairement au passé où les experts étaient parfois, on l’a dit, eux-mêmes propriétaires, il s’agissait cette fois de l’animateur régional de  l’association Pro Silva[36]; or il se trouvait que nous avions déjà eu l’occasion de travailler ensemble dans des actions de formation. C’est donc tout naturellement que nous nous sommes un temps associés pour essayer de trouver une solution conforme aux vues de Monsieur le Préfet.



Pour cela  nous  avons  participé à plusieurs réunions de travail avec les représentants des propriétaires tandis que je prenais parallèlement contact avec les autres parties concernées dont bien évidemment l’ADDU-FU.

        Ce travail se fit en étroite collaboration avec la DIREN, régulièrement informée de l’avancement des réflexions et déboucha sur une première série de propositions envoyées à Monsieur le Sous-préfet[37] avec copie aux membres locaux du Comité de gestion. Elle fut suivie d’une lettre adressée au Directeur Régional de l’Environnement pour faire le point[38],  puis d’une note au Maire de La Teste[39], représentant légal des usagers, pour l’informer de l’état d’avancement des réflexions enfin, après l’annonce de la première réunion du comité prévue le 24 Mars, d’une dernière lettre au Directeur Régional de l’Environnement pour lui préciser les points d’accord qui avaient été trouvés[40].


 

Etant donnée l’importance des points d’accord dégagés et le fait que cela aurait pu constituer enfin l’amorce d’une solution, j’estime qu’il est utile de la publier en entier tout en y apportant les précisions contenues dans les précédentes notes.

 

 

« J'ai l'honneur de vous informer des résultats de la réunion de travail qui s'est tenue le Vendredi 14 Mars entre moi-même et

M.DUPHlL Président du Syndicat des propriétaires de la Forêt Usagère

M.MARZAT: Syndic des propriétaires de la Forêt Usagère

M.BODIN Président de l'Association des propriétaires cantonnants et Syndic des propriétaires.

 

Cette rencontre avait pour but de finaliser les points d'accord éventuels, suite à la sollicitation des propriétaires (lettre du 16 Septembre 1997) et aux conseils que vous leur aviez donnés d'avoir à consulter, comme expert, Monsieur Didier Muller, lequel avait participé à deux réunions précédentes. ,

 

Au cours de cette séance, nous avons constaté notre accord de principe sur les points suivants:

 

1/ Les syndics des propriétaires et des usagers sont chargés des "affaires communes", mais la gestion relève des propriétaires.

Si l’on se réfère aux jurisprudences déjà évoquées, cette affirmation concernant la gestion était une erreur mais c’était une concession indispensable pour que les administrations acceptent le plan et cette responsabilité concédée aux propriétaires  ne pouvait se concevoir que dans le cadre étroit de ce projet expérimental, ce que l’article suivant précisait. 

 

2/ Aucune expérience de gestion ne peut être menée sans une nouvelle convention.

En effet, la Transaction de 1759 précise qu’ " aucun habitant propriétaire ou non propriétaire ne pourra vendre ni débiter aux forains ou étrangers les bois verts ou secs qu'il aura coupés, travaillés  ou non travaillés, ni les faire transporter hors de la dite Juridiction. " et le classement de la forêt implique l'accord de la Commission des Sites et du Ministre chargé des Sites ainsi que celui du Comité d'Orientation (lettre de M. le Préfet du 23 Juin 1997)

 

3/ La Transaction de 1917 ne peut s'appliquer qu'en cas d'incendie (vente des bois brûlés), elle n'est donc pas et c'est heureux, d'actualité.

Erreur de ma part, j’avais oublié de préciser aussi le cas de cyclone

 

4/ La Transaction signée en 1977 pour 5 ans est caduque et ne peut être retenue car elle établissait, quant à la gestion, une confusion des responsabilités contraires aux textes antérieurs.

 

5/La forêt, site classé, doit être gérée en futaie irrégulière et prendre en compte le caractère pittoresque particulier de cette forêt  (relief, forêt de pins mélangée de chênes, coexistence sur l'ensemble du massif mais surtout parcelle par parcelle de pins d'âge très variés, présence d'un sous bois aux essences diverses) selon les termes de votre lettre du 30 Octobre 1997.

En conséquence on ne peut y appliquer que des méthodes respectant ces caractères donc "une sylviculture proche de la nature"

 

(En ce qui me concerne, J'ai rappelé que cela implique l'engagement d'abandonner toute velléité d'appliquer, sous une forme ou sous une autre, et sur l'ensemble du massif, les PSG préparés par le CRPF et que la conservation d'une futaie irrégulière et du sous bois était incontournable.)

 

6/Pour vérifier si ce type de gestion peut, en respectant les objectifs du classement, être économiquement viable et donc procurer aux propriétaires des revenus légitimes, tout en créant des emplois; il est indispensable de procéder à une expérimentation sur une superficie et une durée réduites.

 

7/ Cette expérience sera menée sous la responsabilité de chaque propriétaire avec l'assistance d'un forestier professionnel rompu à ce type de sylviculture, sous le contrôle du Comité d'Orientation et de la DIREN.

 

8/ En ce qui concerne l'ouverture de la Forêt aux personnes non usagères, les propriétaires sont prêts à signer une convention particulière avec la Commune de La Teste selon les termes de l'article L 130-5 du Code de l'urbanisme (ouverture au public contre travaux d'entretien et de gardiennage).

 

9/La création d'emplois jeunes pour assurer l'application de cette convention et participer à l'expérimentation qui demande des moyens humains, est hautement souhaitable. Au bout de 5 ans si l'expérience a été probante économiquement son extension à l'ensemble du massif pourrait permettre de les pérenniser.

 

(Je rappelle à ce sujet ma lettre du 5 Septembre 1997 et les propositions que j’avais faites quant à la formation et à l'utilisation de ces emplois qui déborde le cadre de la forêt usagère)

 

Il s’agissait dans ce projet de faire recruter par une collectivité locale (de préférence la Commune) une dizaine de jeunes qui auraient été formés quant à la connaissance du milieu local par moi-même  tandis que, en liaison avec le Lycée forestier de Bazas et la collaboration du représentant de l’association « Pro Silva », une formation forestière leur aurait été donnée en utilisant les formules prévues pour les « emplois verts ».Il était envisagé pour ces jeunes une quadruple vocation :

-forestière par des interventions, en forêt usagère, sur les semis de Cazaux (dépressage), les zones frappées par la maladie du rond, les parcelles expérimentales

-d’entretien des sentiers sur l’ensemble du site classé et dans le cadre de la convention de libre circulation…

-de surveillance du site classé pour faire respecter les transactions en forêt usagère et les règlements du POS partout ailleurs, avec la possibilité de les assermenter,

-touristique enfin pour pouvoir accompagner des groupes (pas question en effet d’envoyer les gens tout seuls) et développer ainsi un tourisme vert intelligent s’appuyant sur un centre d’accueil sis sur la zone d’aménagement de la dune du Pilat prévu lors de l’opération Gand Site et pas encore réalisé.

 

 10/ Il est nécessaire et logique que le Ministère de l'Environnement, responsable du classement, s’engage matériellement, sous une forme à déterminer, dans cette expérimentation.

On pouvait ainsi envisager l’utilisation de la taxe départementale sur les espaces naturels sensibles, il fallait aussi que, pour les parcelles expérimentales, soit mise en place une caisse autonome étant donné l’imbroglio juridique et financier qui caractérisait alors la caisse syndicale.

 

En conséquence, nous nous sommes mis d'accord sur les propositions suivantes dont nous souhaitons qu'elles soient adoptées le 24 Mars.

 

-Le Comité décidera de s'adjoindre les services de Monsieur MULLER Didier  qui devra être missionné par le Ministère de l'Environnement. Il assurera la direction de la formation des emplois jeunes et servira de consultant pour tout ce qui concerne la gestion.

 

-Le Comité désignera en son sein une commission qui, sous votre présidence, sera chargée, avec M. Muller….., de définir les modalités techniques de l’expérimentation, de rechercher les propriétaires volontaires pour y participer et de préparer le texte de la convention entre propriétaires d'une part, Communes de La Teste et de Gujan d'autre part.

Ce texte très simple devra autoriser la vente des arbres des seules parcelles expérimentales et l'engagement des propriétaires volontaires à respecter sur ces parcelles et pour la durée de l'expérimentation les règles de "sylviculture proche de la nature" qui seront énumérées dans le texte. Cette convention approuvée par le Comité de Gestion et garantie par la DIREN et par la Préfecture, servira de charte pour la durée de l'expérimentation uniquement pour les parcelles concernées. Le reste de la forêt sera soumis aux textes en vigueur.

La commission devra regrouper les représentants de la Commune de La Teste (et de celle de Gujan si elle le désire), les représentants des propriétaires, moi-même, l'ADDU et toute personne qualifiée et compétente.

Si les participants le désirent elle pourra aussi examiner et tenter de régler tous les autres problèmes communs entre usagers et propriétaires (utilisation du chêne.....) afin que s'ouvre une période de collaboration constructive dans l'intérêt de la forêt (à l'exclusion de tout ce qui concerne le cantonnement qui n'est pas du ressort de ces instances et pour lequel chacun restera libre de ses choix).

 

-Une autre commission, composée des mêmes mais plus ouverte (pompiers, DFCI, chasseurs,.......) s'occupera de tous les autres problèmes (circulation,  promenade ....) C'est en son sein que sera établie la Convention sur l'ouverture au public de la forêt dont il a été question plus haut.

 

-Les membres de ces commissions devront être choisis en priorité parmi des personnalités locales

 

-A la fin de l'expérimentation et au vu des résultats économiques et paysagers, il pourra être décidé d'un commun accord d'étendre ce type de gestion à l'ensemble du massif.

En effet, il n’était pas question dans ce premier temps de toucher à la forêt privée dotée d’ailleurs de plans de gestion, était seulement suggérée leur éventuelle révision afin de les rendre compatibles avec les objectifs du classement.

 

Nous pensons que cet ensemble de propositions raisonnables qui peuvent être difficilement dissociées, permettra au Comité de commencer ses travaux de façon sereine et créera une ambiance favorable au règlement non conflictuel des problèmes complexes de ce massif forestier à condition que chaque partenaire "joue le jeu" et s'y implique.

 

Veuillez agréer, Monsieur le Directeur Régional, l'assurance de mes sentiments respectueux.

 

                                     

 

Double à Mrs DUPHIL, MARZAT, BODIN, MULLER.et à Mr Le Maire de LA TESTE DE BUCH.

 

 

4-   Les techniques préconisées par Pro Silva

 

Le fait de faire appel à un expert forestier, Monsieur Muller, qui était le représentant de l’association Pro Silva, permettait de se placer au dessus des parties afin de proposer des solutions nouvelles, d’établir un protocole de gestion et de mettre en place une expérimentation.  C’était aussi  la garantie d’une certaine neutralité puisque tous acceptaient enfin l’idée d’une forêt multifonctionnelle, irrégulière et mélangée.

 

L’expérimentation devait donc se faire selon les techniques de l’association Pro Silva France, apparue en 1990, qui préconise une sylviculture proche de la nature et, comme le montre cet extrait de leur document de présentation, refuse le choix systématique des coupes rases qui avait la faveur des milieux forestiers régionaux.

 

« La sylviculture proche de la nature est un traitement des écosystèmes forestiers basé sur la continuité du couvert et le respect le plus élevé possible des processus naturels de croissance et de renouvellement de la forêt. Elle peut être mise en œuvre pour un très grand nombre d'essences et de stations et repose sur deux principes majeurs : la gestion de la fonctionnalité et la gestion du sous-étage.
 

*la gestion de la fonctionnalité consiste à gérer au mieux l'état existant d'une forêt. La sylviculture pratiquée est une sylviculture à l'échelle de l'individu et non du peuplement. Le diamètre d'exploitation est une notion qui dépend de l'essence, de la qualité et de la station : un arbre sera maintenu aussi longtemps que sa valeur commerciale augmente. Cette règle conduit à concentrer la production sur les sujets de gros diamètre et de la meilleure qualité.

* la gestion du sous-étage sous-entend la gestion de la lumière et des conditions microclimatiques. Elle doit permettre de provoquer et de maîtriser la composition en essences de la régénération. Elle cherche également la diminution des frais de production par utilisation des mécanismes naturels (automation biologique). Dans ces conditions, la régénération n'est pas perçue comme un but en soi mais comme un moyen. Cette gestion du sous-étage est justifiée par une volonté de cumuler la production de jeunes et de vieux, de réduire la concurrence de la végétation adventice, de favoriser la qualité des jeunes plants (éducation en demi-ombre) et de les protéger contre la sécheresse, la chaleur et le gel

Devant la longueur du cycle de production en forêt (souvent supérieure au siècle), la notion de stabilité est fondamentale : il s'agit d'aider la forêt à mieux résister aux agressions possibles (maladies, vent etc.). Cet état est recherché en diversifiant à tous les niveaux (essences, grosseurs et hauteurs), en favorisant le développement de la biodiversité et en permettant aux couronnes des beaux arbres de se développer sans contrainte.

Ainsi, dans cette sylviculture, un arbre remplit plusieurs fonctions à la fois :

*production de bois
*structuration du peuplement
*régénération
*éducation des jeunes arbres
*biodiversité.


Pendant le martelage (opération décisive qui consiste à sélectionner les arbres à abattre), le forestier prendre en compte chacun des points suivants :

 

*prélèvement des arbres parce qu'ils ont atteint leur diamètre objectif, qu'ils gênent des arbres de meilleur potentiel, qu'ils sont dépérissants ;
*maintient de quelques très gros arbres pour des raisons patrimoniales, biologiques et d'éducation des jeunes arbres ;
*respect des essences minoritaires (développement de la biodiversité) ;
*conservation des arbres morts ou à cavités qui sont le biotope d'une faune nombreuse comme les pics ou certains insectes.

Le prélèvement est léger et les passages en martelage fréquents, afin d'assurer un suivi le plus régulier possible des peuplements forestiers. »[41]

 

 

5-Les réunions du Comité et son échec.

 

La réunion du comité devant se tenir en Mars  cela  laissait donc 6 mois pour  recruter les emplois jeunes et organiser leur formation, qui devait au moins durer une année scolaire, et donc plus de 18 mois pour mettre au point les principes de gestion et les conventions prévues.

         C’était sans compter avec les passions locales : la première réunion du Comité[42], présidée par Monsieur le Sous Préfet, se transforma en capharnaüm à cause de la rivalité entre le nouveau président de l’ADDU-FU et certains syndics des propriétaires dont il contestait la représentativité mais aussi à cause d’une assemblée pléthorique car, en plus des déjà trop nombreux membres du Comité, s’étaient invités un grand nombre de gens opposées au classement auxquels  personne n’eut le courage de demander de sortir tandis que nombre de responsables associatifs étaient venus, en délégation.

De plus le document préparé par le GHECO, bureau d’études travaillant pour le compte de la DIREN, comportait un nombre inadmissible d’erreurs en particulier dans le chapitre traitant de la forêt usagère, prouvant une méconnaissance grave de sa réalité statutaire.



L’ambiance fut donc électrique.

Quant aux accords passés dans la phase préparatoire, la DIREN n’en parla point !

C’est donc Monsieur Marzat, syndic des ayant-pins, qui se chargea de lire la lettre ci-dessus ! Seule décision des autorités, les différents membres furent invités à commenter par écrit le rapport du cabinet GHECO en vue de la prochaine réunion prévue le 14 Mai mais qui fut d’ailleurs repoussée au 4 Juin.

C’est pourquoi, étant donnée de la tournure prise par les évènements, un dossier complet fut envoyé aux 23 membres du Comité [43]



Lors de la seconde réunion, le GHECO présenta, sous la forme d’un catalogue alphabétique des sujets évoqués, le relevé de toutes les observations qui avaient été faites en précisant chaque fois si cela relevait ou non de la législation sur les  sites, travail sans intérêt à mon sens car ce n’était pas l’essentiel.

Quant aux propositions qui avaient été faites elles se trouvaient donc « saucissonnées » en différentes rubriques et  insidieusement rejetées ou dans le meilleur des cas  repoussées aux calendes. Il fut cependant décidé de créer 3 commissions sur

-la desserte et la protection du site

-l’occupation du site

-la gestion forestière du site

Ces commissions, pour lesquelles il y eut appel à candidatures devaient travailler dans l’été pour remettre un rapport de synthèse fin Octobre.

 

Malheureusement le vieil adage « quand on veut enterrer un problème on crée une commission » s’est une fois de plus vérifié : elles ne se sont jamais réunies, et  tout s’est arrêté !

 

          Le  changement d’attitude de la DIREN est resté inexpliqué ; d’ailleurs  la personne qui y était en charge  du dossier a quitté ce service et le Sous-préfet a changé d’affectation.

          Les représentants des propriétaires s’étaient-ils avancés trop loin ?

         A qui ces propositions avaient-elles donc déplu ? Lors de la première réunion, à l’évocation de Pro Silva, le représentant du CRPF avait émis un « ça ne marchera pas » catégorique précisant que la seule solution était le cantonnement. Pourtant cette association  reconnue par le Ministère de l’Agriculture et de la Forêt  avait, au niveau national, passé une convention avec l’Association Nationale des CRPF pour présenter ses techniques de gestion, « la sylviculture proche de la nature » comme options lors de l’élaboration des plans de gestion.

         Pourquoi la DIREN, qui  avait été l’initiatrice de ces propositions, ne les a-t-elle point soutenues ?

Qui a mis un veto à la poursuite du travail ?

Pour quelles raisons et à la suite de quelles interventions cette chance n’a pas été saisie ?

 

         Ces idées étaient peut-être trop en avance.

Or, depuis cette époque, elles ont  fait des progrès ; c’est ainsi qu’un rapprochement a eu lieu en 2003 entre Pro Silva et l’Office National des Forêts dont un représentant siège désormais au Conseil d’Administration et que, dans nombre de régions, ces techniques sont désormais recommandées. [44]



 

         E -Les années 1998/2002

 

Elles furent fertiles en interventions médiatiques qu’on retrouvait dans les éditions locales du journal Sud-ouest ou de La Dépêche.

Celles-ci  s’articulaient autour de thèmes illustrant :

-         le conflit entre l’ADDU-FU et les ayant-pins qui s’arc-boutaient les uns sur les transactions , les autres sur la reconnaissance par la Cour d’Appel en 1981 de leur qualité de « propriétaires » et sur les plans de gestion  SRAF-CRPF.

-         l’opposition de plus en plus dure entre l’ADDU-FU et le syndic des usagers testerins dont elle réclama en Septembre le remplacement. et qui finit par démissionner, après 3 ans de mandat en Février 1999

            Ce conflit avait été attisé par la décision de l’ADDU-FU de se substituer aux   responsables légaux, pour organiser, contre l’avis du syndic des usagers, une coupe de pins en forêt mais aussi par le fait qu’elle lui reprochait d’accompagner bénévolement des visites de la forêt dans le cadre des fêtes de Cazaux, intrusion « étrangère » qu’elle ne voulait  plus tolérer estimant que seuls les usagers, les propriétaires et les chasseurs avaient droit d’y pénétrer!           

     Il finira par démissionner se plaignant, dans un article du journal Sud Ouest du 2 Février 1999 du blocage  de   l’institution et du manque de soutien de la municipalité .

 

     -le refus du président des chasseurs, lors de leur assemblée générale, de toute restriction (sur l’utilisation des automobiles…) et de toute intrusion « étrangère » (pistes cyclables…) déclarant d’après le journal Sud-0uest du 3 Juillet 1998 : « le tourisme vert ne peut développer le commerce local car il est incompatible avec la protection de la faune et de la flore » !

L’ancien président  de l’ACCA (qui avait été aussi conseiller municipal et Président de la Commission municipale de la forêt) était d’ailleurs intervenu le 12 Mai pour déplorer l’état d’anarchie dans une forêt devenue « jungle » préconisant de traiter les zones contaminées, d’exiger une redevance pour la coupe des chênes et d’ensemencer des layons pour favoriser la venue des bécasses. Toutes choses qui avaient déjà été proposées lorsqu’il était aux responsabilités mais jamais mises en œuvre !

 

    -la multiplication par l’ADDU-FU des manifestations de protestation sur le terrain contre la vente de bois de chêne (Février 1999), les touristes « envahisseurs »  …et la publicité (Août 2000) ainsi que  des opérations de coupe en application de la transaction de 1759 effectuées grâce à la location d’une scierie mobile. (reportage Sud-ouest des 7 Juillet et 23 Novembre 1999).

                                  

-La multiplication aussi  des interventions  sur des thèmes constamment martelés : absence de syndic gujanais, nécessité d’une nouvelle transaction, absence de gardes, utilisation du bois de chêne et des bois abattus par la tempête, refus du tourisme organisé, de la route Cazaux-Océan, des parcours motorisés, des zones test de gestion, de la préemption par l’Etat…refus aussi de la réhabilitation des anciennes pistes cyclables.

 

A ces interventions répondaient souvent les syndics des ayant-pins, ce qui, en ajoutant les comptes-rendus des évènements judiciaires  et des diverses assemblées, entretenait un climat de tension et pouvait faire croire, la presse étant complice, et la commune de La Teste muette, qu’il n’y avait pas d’autre choix que ceux présentés par ces  deux camps antagonistes.

Pour avoir une idée de cette utilisation des médias, voici le nombre d’articles parus dans le seul journal Sud Ouest pour cette période :

 

1998 : 17        1999 : 17      2000 : 13         2001 : 27           2002 : 29.

 

 

 

F- Le nouveau plan de l’ADDU-FU / APAPDFU.

 

Le 11 Mai 1999 le Conseil d’Administration de l’ADDU-FU adopta un texte que l’Assemblée générale de l’Association des Propriétaires Ayant-Pins Défenseurs de la Forêt Usagère (APAPDFU) adopta elle aussi le 15 Mai. Ces deux associations avaient, depuis le 20 Avril, le même président.

 

Ce texte était articulé en 3 parties : un   «  historique des droits d’usage », un « projet d’orientation en vue de la sauvegarde, de l’administration et de la gestion de la forêt usagère de La Teste » et un « projet de transaction » qui reprenait la seconde partie.

Très souvent inspiré des études précédentes, ce document proposait de diviser la forêt en 2 ensembles.

Le premier dit « sensible » était composé des zones humides, des abords de la dune et des berges du lac où tout abattage serait interdit ainsi que des fortes pentes où seul l’abattage des chênes le serait.

Le reste, la zone « normale », serait gérée :

-éclaircissage, semis ou plantation dans les parcelles saines (le but étant d’obtenir une forêt de pins espacés de 8 à 10 mètres),

-abattage dans les parcelles malades d’un maximum de 30 pins  impropres au bois d’œuvre par hectare, sans dessouchage et sans toucher aux pins-bouteille ni aux pins-bornes, sauf s’ils sont morts et secs.

-passage du rouleau landais et réensemencement naturel ou, sans résultat après 2 ans, semis à la volée ou plantations.

Les travaux ultérieurs : dégagement des semis par coupe manuelle des fougères, dépressage à 5 et 10 ans, élagage à 10-12 ans, éclaircissage à 15-20 ans puis tous les 4 ans, ayant pour but le maintien d’une forêt jardinée et l’obtention de pins de place pour « l’usage des générations futures ». Un traitement spécial étant réservé aux coupes sanitaires prévues sur les « pins morts » avec zone de protection (coupe des pins vifs voisins et tranchée) pour éviter la propagation des maladies par les racines.

Sauf exceptions, il serait interdit de toucher aux autres espèces sauf les chênes taillis en dessous d’une circonférence de 1,20 mètre (on était loin du taillis !) qui pourraient être coupés sur toute la superficie de la zone normale avec un « maximum de 10 stères par foyer et  an » pour les seuls occupants d’un « logement équipé de chauffage au bois (cheminée, poêle…) »  et toute coupe de feuillus serait interdite dans un rayon de 150 mètres autour des cabanes et, dans la mesure du possible, dans les parcelles en régénération . D’autre part les usagers devaient, sauf autorisation exceptionnelle, couper leur bois eux-mêmes sans intervention extérieure même bénévole.

Cette régénération devant concerner 300 hectares par an.

Pour gérer tout cela, le projet prévoyait la désignation de 4 syndics généraux (2 non ayant pins  et 2 ayant-pins) ayant « les mêmes pouvoirs d’administration et de gestion de la forêt » prenant leurs décisions à l’ unanimité , gérant conjointement la caisse syndicale (encaissement des ventes et paiement des frais) mais ayant « le droit individuellement d’ester en justice » et d’une « Commission de la forêt » chargée d’arbitrer les litiges, d’établir le plan et le calendrier de la régénération, de recevoir les projets présentés par pour chaque parcelle par les ayant-pins ou les gérants et de se substituer à eux « en cas de carence »

C’est là que résidait la principale nouveauté : les 2 syndics des non-ayant pins devaient être nommés par l’ADDU-FU quant à la Commission de la forêt elle réunissait les 4 syndics, la DIREN (2, avec  la présidence), l’ADDU-FU (2) les communes (2) et à titre consultatif « des représentants d’associations, agrées environnement, ayant leur siège dans le territoire de La Teste ou de Gujan et dont les statuts ont vocation forestière »

Ainsi  les communes étaient exclues de la désignation des syndics mais pas de la répartition des bénéfices éventuels qui restait conforme à la transaction de 1917, ni du comblement des éventuels déficits (auquel devait aussi contribuer la DIREN). !

Les associations comme la SEPANSO (siège à Bordeaux) ou la Société Historique du Pays de Buch, qui n’avait pas de « vocation forestière » étaient elles aussi exclues tandis que des associations satellites de l’ADDU-FU comme celle des propriétaires opposés au cantonnement ou  la Société civile du patrimoine des usagers, pouvaient, en se faisant agréer, entrer à la commission.

Quant aux ayant-pins ils étaient éliminés n’ayant plus que 2 voix sur 10.

Ce projet prévoyait aussi deux gardes et « un technicien forestier nommé par la DIREN »

En ce qui concerne la délivrance de bois aux usagers elle était interdite pour « les pins abattus lors de la régénération … vendus à l’usage exclusif de l’industrie » mais permise pour « les pins abattus lors de travaux d’utilité publique »,

D’autres clauses traitaient

 -des chemins (qui devaient être entretenus par la seule DFCI),

 -de la libre circulation y compris motorisée réservée aux seuls usagers et ayant droits, « dans la pratique de leur droit d’usage ou de leur concession »

-de la création souhaitée d’un GR bis pour vététistes et cavaliers et l’officialisation du GR8 (que les propriétaires refuseront en Décembre 1999 et contre lequel l’ADDU-FU se prononcera elle aussi dans un article du journal Sud Ouest du 2 Novembre 2000 !)

 -des commerces, des clôtures, des nouvelles routes, tout cela interdit,

 -de l’apiculture, de la chasse, de la protection des vestiges archéologiques, des incendies.

 

Ce projet  intégrait des règlements existant déjà mais ne relevant pas des transactions et  des emprunts aux plans précédents. Il était séduisant quant à son souci de régénération encore que l’utilisation systématique du rouleau landais et la volonté d’abattre, sur 300 hectares par an, tous les « pins champignonnés impropres au bois d’œuvre » risquait, vu leur nombre, de transformer d’un coup le paysage… De même, quand on connaît le nombre de maisons et de villas possédant des cheminées, on peut se demander, à raison de 10 m3 par an, combien de chênes resteraient en place.

Mais  ce projet  manifestait surtout la volonté d’hégémonie de l’ADDU-FU et ne pouvait être qu’un vœu pieux car il était évident que les autres partenaires dont les pouvoirs étaient réduits,  ayant-pins et  communes, ne pouvaient l’accepter d’autant que l’un d’entre eux, Gujan, s’était retiré. Il faut rappeler que depuis le 20 Février 1997, le Maire de Gujan avait supprimé au syndic des usagers de sa commune sa délégation et se refusait à en nommer un nouveau bloquant ainsi l’institution.

 De plus l’effondrement des cours du bois consécutif à la tempête de 1999 allait en ruiner les perspectives économiques qui d’ailleurs n’avaient pas été chiffrées.

 

G- L’offensive contre les dispositions du POS

 

En 2001, le 14 Décembre, une nouvelle association vit le jour : menée par un ancien élu, elle prit le titre d’ « Association des propriétaires et occupants au droit de la propriété de la forêt de La Teste de Buch pour la défense et la protection de la nature de ses cabanes et de ses traditions (A.P.O.D.P de la Forêt de La Teste de Buch) » mais la lecture de ses statuts éclairait d’un jour particulier la complexité de son titre.

Outre un projet louable d’écomusée elle avait en effet  « pour but le recensement et la recherche de cabanes existantes ou démolies ; également de favoriser leur maintien ou leur relevage aux mêmes endroits et normes qu’autrefois, tout en respectant le POS ou le PLU sauf à demander à participer à l’élaboration des textes…. »

 

Cette création participait d’une offensive générale  contre les dispositions du Plan d’Occupation des Sols en vigueur depuis 1978 qui n’autorisait que la reconstruction des cabanes régulièrement construites et disparues avec la restriction qu’en tout état de cause il ne pourrait être construit qu’une  cabane par parcelle-mère, représentée sur la carte de Durègne, avec une superficie de 32 mètres carrés. En effet en 1901, lors de l’établissement de la carte, Durègne recensait 97 cabanes,  11 parcelles en comportant deux et 1 parcelle en comptait 4.

C’était aussi une offensive contre les restrictions apportées par le classement du massif.

 

Bien avant que n’ouvre l’enquête sur la révision du POS, le 6 Octobre 2000, le Président de l’ADDU-FU et de l’APAPDFU ( propriétaires hostiles au cantonnement), avait  présenté au Maire la proposition du Conseil d’Administration de l’ADDU-FU : suppression de cet article et son remplacement par  le texte suivant « En forêt usagère seules les cabanes figurant sur la carte de Durègne pourront être construites…avec une emprise de 48 mètres carrés…plus un chai d’environ 15 m2 ».

Comme la loi permettait « la reconstruction à l’identique d’un bâtiment détruit par un sinistre …dès lors qu’il a été édifié régulièrement …nonobstant toute disposition d’urbanisme contraire, sauf si la carte communale ou le plan local d’urbanisme en dispose autrement. » il fut fourni aux services d’urbanisme, pour être annexée au POS, une carte sur laquelle figuraient toutes ces cabanes 

 

C’était donc rompre avec les positions prises par l’ADDU dès 1978 et l’on peut se demander s’il n’y avait pas confusion entre les intérêts des usagers et ceux des propriétaires. D’après le journal La Dépêche du 8 Mai 2002, le Conseil d’Administration de l’ADDU-FU comptait à cette date, sur 21 membres, 15 propriétaires (certes tous opposés au cantonnement).

 

Il faudra attende 2007 pour que cette demande soit acceptée par la nouvelle municipalité, quelques mois avant les élections municipales. Ce qui prouve  l’incapacité des élus à résister, avant les élections, aux groupes de pression. Lors de l’approbation du Plan local d’urbanisme, le 6 Octobre 2011, un nouvel élément fut ajouté : l’inventaire photographique de toutes les cabanes existantes. Ce document doit servir pour « la réfection des cabanes forestières » et « la (re)construction à l’identique après sinistre des constructions existantes »

Quant aux cabanes forestières répertoriées sur la carte de Durègne, la disparition de la restriction d’une seule cabane par parcelle mère a été remplacée par :

La possibilité de les reconstruire « à condition que des vestiges soient encore visibles sur le site », la superficie restant de 8x4.

Ce règlement suppose donc un contrôle réel sur le terrain de la part des services de l’urbanisme.

 

H- Natura 2000.

 

L’autre grande affaire de cette période fut la mise au point laborieuse des sites Natura 2000.

Ces zones de protection rendues obligatoires par des décisions prises par les gouvernements dans le cadre de la politique européenne, furent définies dès 1996 sans aucune concertation locale des principaux intéressés.

A cette époque, la Forêt usagère fut comprise dans le périmètre proposé soit 6000 hectares correspondant au site classé. C’est pourquoi par délibération du 9 Mai 1996, le Conseil Municipal de La Teste s’opposa à cette mesure.

 

Mais la Préfecture continua à travailler en ce sens et le groupe thématique N°2 « Dunes, milieux littoraux et Forêts littorale », se réunit en Novembre 1997 ; la commune, malgré sa demande, n’y était pas représentée, par contre les propriétaires par l’intermédiaire du CRPF l’étaient.

Il fut écrit dans le document intitulé «  Analyses et objectifs » que le classement avait pour but :

-La « conservation des éléments particuliers de la forêt usagère de La Teste (pins-bornes, clairières, marais, zones humides). »

-Le « maintien de la diversité chênes/pins maritimes. »

-La « préservation de types d’habitat peu rares en Aquitaine ( !) mais d’importance communautaire. »

Le document indiquait comme espèces retenues et identifiées  cerambyx cerdo (le Grand Capricorne) et Lucanus cervus (le Lucane Cerf-volant) insectes coléoptères se nourrissant de bois mort ou dépérissant, principalement de chênes.

Ces objectifs de conservation louables étaient tempérés par la suite du texte. En effet dans le chapitre « Lignes d’action –Responsabilité de la gestion » il était précisé :

 

« En ce qui concerne la forêt usagère de La Teste, aujourd’hui le caractère pittoresque de cette forêt masque des réalités et des menaces qui compromettent son avenir :

-le vieillissement des peuplements et l’embroussaillement des parcelles qui réduisent la valeur marchande des bois et renchérissent les coûts de régénération

-la disparition totale des délivrances de bois pour l’usage et de toute autre coupe, alors qu’à raison de 5 m3 par an et par hectare, ce sont au moins 15000 m3 de bois qui pourraient être exploités pour l’entretien de la forêt avec une répartition régulière des classes d’âge.

-le prélèvement anarchique de bois feuillus par des non-propriétaires et en dehors de tout contrôle et au mépris de tout souci de conservation de l’aspect du site,

-l’embroussaillement qui aggrave le danger d’incendie dans une zone très fréquentée en période de risque et qui viendra s’ajouter à la topographie pour entraver l’action des pompiers et créer une menace supplémentaire pour les vies humaines.

          Le projet de site Natura 2000 s’ajoute au classement déjà effectué …il faut donc, pour la cohérence de la gestion, traiter les deux affaires en parallèle et élaborer le cahier d’orientation et de gestion du site classé avant le document d’objectif Natura 2000 dont l’échéance est en 2004.

Il faut aussi convenir avec les propriétaires gestionnaires chacun de leurs parcelles des objectifs qui permettent d’atteindre un état de diversité et d ‘équilibre des peuplements qui assure la conservation des milieux et des paysages ;cet objectif doit être compatible avec les objectifs de production des divers types de stations et de peuplements[45]. »



La description apocalyptique de la forêt dénotait l’influence de ceux qui depuis des années militaient pour le cantonnement (option préférée et souvent affirmée du CRPF), dans un processus de désignation de sites qui devait au départ être fait sous l’égide des scientifiques du Muséum d’Histoire Naturelle !

 

Les 9 Mai 1996 et 21 Janvier 1998, le Conseil municipal, enfin consulté, se prononça contre le projet et le 22 Juin 2001 le Conseil d’Etat annula la décision gouvernementale concernant la transmission aux autorités européennes de la liste de 534 sites au motif, comme il l’avait déjà dit dans un premier jugement du 27 Septembre 1999 que « le gouvernement n’avait pas apporté la preuve qu’il y avait eu des consultations locales »

C’est pourquoi l’ordonnance du 11 Avril 2001 précisa « avant la décision de désigner une zone …le projet de périmètre est soumis à la consultation des organes délibérants des communes…L’autorité administrative ne peut s’écarter des avis motivés rendus à l’issue de cette concertation que par une décision motivée ».

Elle indiqua aussi qu’après la notification à la Commission européenne de l’inscription d’un site  « l’autorité administrative établit pour chaque site en concertation avec les collectivités territoriales…les représentants des propriétaires et exploitants…un document d’objectif qui définit les orientations de gestion et de conservation, les modalités de leur mise en œuvre et les dispositions financières d’accompagnement…Pour l’application du document d’objectifs, les titulaires de droits réels et personnels …peuvent conclure avec l’autorité administrative des contrats d’engagements conformes aux orientations définies par le document d’objectifs …et les modalités d’aides de l’Etat »

L’affaire avait au plan local comme national déclenché l’ire des chasseurs inquiets pour l’avenir de leur activité pouvant être suspectée de « perturber » de la faune sauvage. Cette notion retenue par la Cour Européenne de Justice en 1994 était pourtant rejetée par la loi française d’habilitation transcrivant dans le droit français les textes communautaires. La commission européenne  interpellée à ce sujet en Juillet 2001 par un parlementaire, avoua cependant que la question était complexe précisant que « sur un site particulier les perturbations sont évaluées au cas par cas » et, prudente, que « la Cour de justice est seule compétente pour interpréter le droit communautaire ».

 

 

I- Les élus et la forêt usagère.

 

Lorsque s’achève cette double législature et à la veille d’un changement de majorité, (la commune est en effet, depuis 2001, dirigée par une coalition réunissant les partis de gauche, les verts et une partie du centre) , il est peut-être bon de se retourner sur l’intérêt porté par les élus aux problèmes de la forêt usagère.

 

Le graphique réalisé d’après les registres des Conseils municipaux, nous éclaire sur leur attitude. Si la période d’après guerre fut surtout marquée par la tradition (informations sur les cubages délivrés) et les questions financières liées à la vente des pins incendiés, la période qui va de 1951 à 1977 voit une baisse d’intérêt.

C’est surtout la commission intercommunale et les syndics qui décident, le Conseil ne faisant qu’entériner : c’est le cas en 1951 pour la signature de la nouvelle transaction, c’est aussi le cas en 1954 pour la transaction suivante. Si les séances s’animent ensuite c’est parce que la commune est attaquée en justice, sa représentativité étant, on l’a vu, contestée. De 1965 à 1971 c’est de nouveau le calme sauf en  1967 avec le retrait bruyant de M. Capdeville qui, propriétaire, conteste la politique municipale sur cette affaire et décide de ne plus participer aux décisions concernant la forêt.

 

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C’est à partir de 1973 que certains élus commencent à s’insurger contre la mise devant le fait accompli du Conseil Municipal, c’est ainsi que le 27 Novembre 1973 l’accord entre les syndics et la commission intercommunale fut, à la demande d’un élu, refusé par le Conseil dont les commissions compétentes n’avaient pas été consultées. En conséquence,  sur les 3 dernières années de la législature, les discussions sur la nouvelle transaction se firent aussi dans les commissions du conseil Municipal, désormais  ouvertes aux associations  et vinrent en discussion devant le Conseil.

Dans la période1977-1989, à cause de l’offensive des propriétaires, la commission intercommunale fut complétée par une commission extra municipale ouverte aux associations opposées au cantonnement. (ADDU et SEPANSO). C’est dans cette instance que la préparation des décisions et leur suivi furent effectués, la commission intercommunale perdant petit à petit de son importance, à cause de l’attitude des élus gujanais favorables aux thèses des propriétaires. Mais c’est toujours le Conseil Municipal qui décida comme en témoigne le grand nombre de délibérations prises pendant cette période.

Par contre de 1989 à 2001 sous les deux municipalités suivantes, le calme retomba. Ni la commission, on l’a vu, ni le Conseil n’eurent à débattre de la forêt usagère sauf très indirectement lors du rejet de Natura 2000.

Malheureusement depuis le classement du site en 1994, ce n’était plus à La Teste mais à Bordeaux, voire à Paris que se prenaient les décisions.

 

III-La législature 2001-2007.

 

En 2001, c’est l’arrivée au Conseil municipal de La Teste d’élus « verts » appuyés par l’association « Bassin d’Arcachon Ecologie » créée en 1989, dont l’engagement sincère pour une politique de protection rigoureuse de l’environnement était affirmé, allait compliquer un peu plus la situation d’autant, on le verra, que le Conseiller Général, se positionna sur des positions très proches.

De plus, au lieu de recréer une commission extra-municipale regroupant autour d’elle les opposants au cantonnement et les protecteurs de la forêt, la nouvelle équipe, ouvrit sa commission à tous, usagers, propriétaires forestiers et associations de toutes obédiences ainsi qu’à moi-même puisque le Conseil Municipal eut l’amabilité de m’y inviter comme « personnalité qualifiée ». Le résultat fut l’impossibilité d’arriver à une quelconque position constructive,  et elle ne fut réunie, sans aucune utilité, que deux fois les 17 Juin et 20 Décembre 2002.

 

Un exemple de cette paralysie, fut l’impossibilité, en Juin 2001, de trouver un accord pour abattre les arbres dangereux bordant la piste 214 entre les routes Pyla-Biscarrosse et La Teste-Cazaux. 

Cet abattage avait été demandé par les syndics mais des contestations se  manifestèrent sur la destination de ces bois (vente au profit de la Caisse syndicale ou remise aux usagers, les textes étant muets sur ce point.) et sur le statut de cette piste

Les propriétaires prétendaient qu’elle était privée ; or  les experts judiciaires nommés en vue du cantonnement ont interrogé le service des Domaines et retranscrit leur déclaration : « les acquisitions des parcelles constituant l’assiette de la piste 214 ont été réalisées selon actes en date du 5 juillet 1951 et du 12 Novembre 1955….et sont aujourd’hui des dépendances du domaine privé de l’Etat affecté au Ministère de l’Agriculture » ; il précisait que la route avait été rendue aux Domaines le 10 novembre 1989. A propos de  la demande de transfert de propriété de l’Etat vers la commune, celle-ci s’engageant à l’entretenir, il écrivait : « cette procédure… n’a pas encore abouti ».   

D’ailleurs, en 1972 le Conseil municipal avait, sans succès, demandé, le 19 Décembre, son classement dans la voirie départementale.

 

La difficulté à promouvoir des solutions locales se manifesta dès le premier dossier.

 

 

A- L’échec de la tentative de relance du Comité de Gestion

 

Ce comité dont l’histoire a été relatée dans les pages précédentes, la nouvelle municipalité de La Teste en avait, dès Septembre 2001, demandé le rétablissement tout en suggérant la réduction de ses effectifs et la priorité donnée aux acteurs locaux.

Après plusieurs entrevues avec les représentants de la DIREN, qui semblaient s’y monter favorables, le projet fut mis en sommeil.

Au même moment, différents acteurs, les Verts, l’association Bassin d’Arcachon Ecologie et le Conseiller Général du Canton de La Teste d’une part, les  propriétaires d’autre part, agirent, chacun de son côté, pour imposer leurs propres solutions.

 

B- La victoire des « Verts » : le retour  de Natura 2000. 

 

Le 21 Décembre 2001, le Préfet reprenait la procédure : alors que le projet adressé au Maire ne concernait que « les dunes modernes du littoral landais d’Arcachon à Mimizan » et ne retenait plus, pour le territoire de La Teste, que les 82 hectares de la forêt dite de Camicas, appartenant au Conservatoire du Littoral, un article du journal Sud-ouest publiait une troisième liste de sites proposés comportant la totalité du site classé dont la Forêt usagère. Cette annonce fut confirmée le 11 Janvier par un article du président de l’APODP[46]



Le site de la forêt usagère avait été effectivement retiré malgré les regrets publics exprimés par le Conseiller Général qui, jugeant la procédure justifiée mais incohérente, réclamait cependant l’ajout entre autres de toute la forêt classée, demande déjà formulée  deux jours plus tôt par le Président des Verts[47], et soutenue activement dans une lettre au Préfet par l’association Bassin d’Arcachon Ecologie[48].



 

En conséquence, tout en se déclarant favorable au principe de Natura 2000, le Conseil municipal, le 18 Février 2002, à l’unanimité moins trois voix, refusa le projet à cause de l’imprécision des cartes et du flou de la procédure, refus confirmé en séance du 14 Novembre. A ce propos il faut signaler que, dans le document d’accompagnement et sur le site Internet Natura 2000 publié par la DIREN Aquitaine, ce site de Camicas était qualifié de « forêt usagère » !!

        En 2003 l’offensive des partisans de Natura 2000 continua, le Conseiller Général réclamant publiquement


que la forêt usagère soit de nouveau inscrite ajoutant qu’elle avait été « abusivement exclue » alors qu’elle était prévue en 1995 ce « qui aurait arrêté la procédure de cantonnement », alors que cela n’avait rien à voir avec la procédure judiciaire en cours.

La France n’ayant rendu qu’une copie incomplète, une nouvelle procédure fut lancée fin 2004 par le gouvernement pour « combler les lacunes du réseau de sites », les propositions devant être faites pour le 15 Octobre 2005.

C’est alors qu’une partie seulement du site classé dont une très grande partie de la Forêt Usagère fut réinscrite mais, tandis que les précédentes propositions avaient déclenché des polémiques, celle-ci se fit dans l’indifférence générale : aucune réunion de la Commission de la Forêt, aucune délibération du Conseil Municipal (qui faute d’un avis dans les deux mois était réputé favorable), pas d’articles de presse, mutisme des propriétaires, des chasseurs, de l’ADDU-FU !

A peine un petit article en page 2 de l’édition du journal Sud-ouest, le 16 Décembre 2005, dans lequel le Secrétaire Général de la Préfecture déclare « nous avons rempli notre contrat » grâce à la transmission, le 13 Décembre, de 4 nouveaux sites dont « les forêts dunaires de Buch ». Ce n’est qu’en Février 2006 que l’affaire devint publique et déchaîna les passions, la politique locale amplifiant la polémique.

La forêt usagère (sous réserve de l’approbation probable des autorités européennes) sera désormais  protégée par une nouvelle législation, ce qui ne résoudra  rien !

En effet les choses sérieuses ne commenceront qu’avec la mise au point, avec tous les acteurs (administrations, collectivités, propriétaires, titulaires de droits réels et personnels) du document d’objectifs (DOCOP) qui définit les orientations de gestion et de conservation, les modalités de leur mise en œuvre et les dispositions financières d’accompagnement…préalables aux contrats d’engagements conformes aux orientations définies par le document d’objectifs et prévoyant les modalités d’aides de l’Etat»  [49]


 


 

 Se reposera la même question que, on le verra plus loin, pour la charte forestière : des propriétaires qui n’ont pas la maîtrise des arbres peuvent-ils signer des conventions de gestion ?

On reviendra donc à la case départ, celle prévue par le Comité de Gestion dont les conclusions devaient, rappelons-le, servir de préalable au document d’objectif Natura 2000.

En fait on ajoute un nouveau texte protecteur qui, du fait de ses implications « européennes » risque de compliquer un peu plus la situation.

 

  On reste d’ailleurs perplexe à la contemplation de la carte car toute la partie de la forêt usagère qui borde le lac de Cazaux est exclue (!!!) tandis qu’une bonne partie du site classé subit le même sort ( !). Par contre les terrains privés au nord de la route du Pyla, urbanisables et hors du site classé, en jaune sur la carte, sont concernés et qualifiés eux-aussi d’usagers ! Donc, si l’on en croit ces « spécialistes », la forêt « usagère » serait donc passée, par un coup de baguette magique de  3788 à  5207 hectares !!! Si l’on ajoute aussi les lotissements déjà urbanisés qui ont été compris dans le périmètre, on a l’impression d’un travail répondant à des motivations auxquelles le Muséum d’Histoire Naturelle, derrière lequel on s’abrite, doit être étranger et qui n’ont rien de scientifiques.

 

Affaire à suivre donc….

 

 

C- Les nouvelles initiatives des propriétaires ayant-pins

 

Pendant ce temps les ayant-pins  reprenaient l’initiative : en Juillet 2002, ils proposèrent à la Municipalité de La Teste « pour aider à un déblocage de la situation », un plan qui s’articulait, selon leurs propres termes, autour de deux points : « borner la servitude de l’usage en bois d’œuvre et confier la gestion forestière à la Coopérative des propriétaires agissant sous la directive de l’Architecte des Monuments Historiques dirigeant le Comité de gestion du Site classé. »

De janvier à juin 2003, plusieurs réunions furent organisées, à leur initiative, dans les locaux municipaux, au cours desquelles leur projet et leurs conceptions furent précisés.

Refusant de se considérer quant au bois comme de simples usagers (et ce malgré les décisions du Conseil d’Etat et de la cour d’appel de 1984), s’appuyant toujours pour cela sur une phrase, sortie de son contexte, du jugement de la Cour d’Appel de 1981 reconnaissant « le droit de propriété des habitants ayant-pins sur les parcelles qu’ils détiennent sur le territoire de la forêt usagère de La Teste », ils en revenaient toujours aux mêmes idées fausses ressassées depuis le début des procédures à savoir :

-l’usage ne peut être sauvegardé dans son statut actuel.

-il n’y a pas d’autres servitudes que le droit d’usage en bois !

-comme il n’y a plus d’usage, les propriétaires se considèrent comme propriétaires de tout le bois non réclamé mais ils acceptent cependant  sur les coupes futures, de donner à l’usage un pourcentage de bois  à fixer de manière définitive dont la distribution aux usagers sera à la charge de la commune.

-les investissements pour la reconstitution de la forêt par les propriétaires doivent correspondre aux conditions économiques actuelles.

-la survie de la forêt exige des coupes rases par parquets de taille économiquement significative mais il faut aussi la gérer avec le souci de son caractère paysager…, c’est à dire une forêt de pins maritimes avec sous étage de chênes.

-pour des manifestations ponctuelles et touristiques pourront être déterminés, par contrat et contre paiement, des parcours d’activités et de loisirs, l’argent récolté servant au gardiennage.

-la coopérative forestière, relancée en 2000 « sur une idée du bâtonnier Cuvreau », et, d’après leurs déclarations, considérée favorablement par la DIREN, assurera les travaux pour le compte de chaque propriétaire et s’occupera des formalités administratives, forte d’un capital initial de 60.000 euros. Il s’agissait de l’ancienne Coopérative des résineux fermée en  1977 mais dont les comptes n’avaient jamais été clôturés.

A ce sujet, au fil des réunions et selon l’auteur des rapports  la question de la participation des propriétaires à la coopérative variera : dans le document de Février 2002, elle sera obligatoire (pour les démarches administratives) mais facultative (pour la gestion forestière autorisée) puis deviendra, dans le document du mois de Mai, ce qui était un progrès manifeste, « une structure évolutive obligatoire pour la forêt usagère et facultative pour les semis ».  

Le projet concernait en effet l’ensemble des forêts classées sur dunes anciennes (forêt usagère) ou dunes modernes (semis)  

Pour faire fonctionner tout cela étaient prévus trois organismes dont la composition n’était d’ailleurs pas fixée :

-Un Comité de pilotage du site classé, chargé de fixer les directives et objectifs de gestion et de préparer les décisions du Ministre de l’Environnement.

-La coopérative, formée des seuls propriétaires, qui définit les travaux, choisit les moyens et salarie un technicien forestier chargé des démarches et des travaux.

-Une commission de la Forêt, organisme de contrôle de la coopérative pouvant ester en justice.

 

En résumé il s’agissait de faire entériner par la municipalité de La Teste non seulement le cantonnement de Gujan dont le représentant déclara accepter de signer un texte mais seulement « en tant que propriétaire de 300 hectares », et de cantonner définitivement les droits d’usage testerins par un système qui évite de donner à la commune une part de la forêt mais permette en fait d’appliquer les plans de gestion imaginés en leur temps par le SRAF.

 

L’intransigeance des propriétaires organisateurs des débats, en retrait complet sur les positions de 1998, et celle des usagers qui voulaient chacun imposer leur point de vue, ajouté au fait que les représentants de la commune de La Teste n’avaient aucun pouvoir de négocier et n’étaient là qu’en auditeurs, avait une fois de plus conduit à une impasse et à l’impossibilité de discuter de ce qui importait : le type de forêt à perpétuer, son état actuel et les méthodes à lui appliquer.

 

La question que l’on peut se poser c’est pourquoi les responsables des propriétaires ont-ils pris cette initiative ? La réponse est peut-être à chercher dans l’évolution de la procédure engagée en 1994 pour un cantonnement général et dans le rapport des experts qui est enfin déposé.

 

D- L’expertise en vue du cantonnement judiciaire et la fin( ?) de cette procédure.

 

Il faut se rappeler qu’en 1994, le 10 Janvier, le Tribunal de Grande Instance saisi, par les propriétaires, en application de la nouvelle loi forestière, d’une nouvelle demande de cantonnement, avait décidé de faire rechercher par deux experts le nombre total de propriétaires, leurs titres de propriété et la superficie de la forêt. En effet, pour pouvoir cantonner il fallait réunir soit les 2/3 des propriétaires et la moitié de la superficie, soit les 2/3 de la superficie et la moitié des propriétaires.

Les experts qui avaient 6 mois pour faire ce travail mirent 10 ans…  car l’examen des titres de propriété se heurtait à de grandes difficultés d’autant que le nombre d’indivisions était important. Il fallut donc plusieurs arbitrages judiciaires entre 1996 et 1998  pour arriver à imposer une méthode pour le comptage des voix ; celle qui avait était définie ne convenait pas aux propriétaires qui, le 30 Juin 1998, portèrent le différend devant le Tribunal. Ce n’est que le 28 Mars 2000 que le Tribunal de Grande Instance, confirmant sa décision de 1996,  débloqua la situation en décidant que les demandeurs en indivision compteraient pour un seul et n’auraient qu’une voix à condition qu’il y ait accord de tous les indivis et rappela l’obligation de chaque partie d’établir sa qualité de propriétaire.

Un premier rapport fut donc remis le  28 Janvier 2002 et le rapport « définitif » le fut le 8 Avril 2004 après que le juge ait écrit aux parties (25 Novembre 2003) pour leur demander leur avis. Malgré les invraisemblances, que j’ai exposées plus haut, concernant la superficie seul l’avocat de l’ADDU répondit considérant « qu’une nouvelle réunion n’est pas utile »

Le juge ordonna donc (30 Janvier 2004) le dépôt du rapport définitif qui fut remis le 8 Avril 2004[50].


 

Les experts y constataient l’impossibilité de connaître le nombre exact de propriétaires car pour 790 hectares « les titres produits sont tous incomplets ou imprécis ou comportent des erreurs…et ne …permettent pas de retrouver les propriétaires exacts ». Cela avait déjà été constaté en 2001.

En conséquence, les experts concluaient que  les propriétaires demandeurs (53 propriétaires et 23 indivisions) dont les titres sont complets possédaient 2253 hectares soit plus de la moitié (61%) mais moins des 2/3 (66 %) de la superficie retenue (3651 ha au lieu des 3862 cadastrés) et  que seulement 79 % de la superficie avait pu être étudiée.

Les experts, dans l’impossibilité de conclure, s’en remettaient donc au Tribunal

La première condition posée par la loi pour demander le cantonnement, 2/3 de la superficie, 1/2 des propriétaires n’était pas réunie. Quant à la seconde, 2/3 des propriétaires et 1/2 de la superficie, étant donné l’impossibilité de connaître le nombre exact de propriétaires, elle était compromise.

Dans ces conditions  il était raisonnable de  se demander si le cantonnement judiciaire pouvait avoir lieu ce qui explique peut-être cette nouvelle tentative de cantonnement amiable.

De plus en Juillet 2004 arriva la facture des expertises à la charge des propriétaires  demandeurs du cantonnement, cela représentait avec les honoraires la somme de 89649,96 euros, certaines sommes ayant déjà été versées.

Est-ce pour cela que ces derniers temps de grosses propriétés ont été mises en vente.  De toute façon, après 24 ans de procès, nombre de propriétaires doivent regretter d’avoir fait confiance à des responsables sûrs de réussir aussi vite et aussi complètement qu’à Biscarrosse.

 

Jusqu’à nouvel ordre le cantonnement est donc irréalisable; l’affaire qui devait venir devant le Tribunal le 30 Octobre 2007 a été jugée, après un nouveau report, le 26 Février 2008 et le Tribunal de Grande Instance de Bordeaux a , le 11 Mars 2008, pris sa décision : 

Etant donné qu’au regard « de l’important travail réalisé par les experts qui ont établi pour chaque parcelle les titres produits, les éléments manquants et les conclusions qu’ils en tiraient, les demandeurs n’ont fait aucune observation précise en réponse. »

Etant donné d’autre part qu’ils « n’ont pas davantage répondu aux interrogations relatives à l’identité imprécise de certains d’entre eux et aux incohérences relevées par les experts ou par  les communes défenderesses (personnes décédées, personnes figurant à la fois comme demandeurs et défenseurs…),  il apparaît donc que ni les conclusions des experts, ni les pièces produites aux débats, ne permettent de considérer que les demandeurs ont apporté la preuve qui leur incombe qu’ils remplissent les conditions de majorité exigée par l’article L 224-3 du code forestier. 

Leurs demandes doivent être considérées comme irrecevables.»

 

 Les conditions n’étant pas remplies, la demande de cantonnement fut donc rejetée. Les ayant-pins avaient auparavant tenté de faire modifier les règles de calcul qu’ils avaient au préalable acceptées, mais le tribunal n’a pas accepté cette ultime manœuvre.

Après avoir constaté le désistement de 13 d’entre eux, le tribunal condamna en outre les ayant-pins aux dépens et à « payer  aux communes de La Teste de Buch, Arcachon et Lège Cap Ferret la somme de 2000 euros » ainsi qu’à l’ADDU-FU.

La commune de Gujan Mestras ne figure pas dans cette liste puisqu’elle a plaidé qu’elle ne pouvait être concernée par ce procès, ce que le Tribunal a admis. En effet, depuis son cantonnement amiable de 1993 confirmé par deux décisions des tribunaux en janvier 1994 et Octobre 2006, elle n’est plus une commune usagère.

Mais ce n’est pas encore terminé puisque le 29 Août 2008 les propriétaires ont fait appel.

 

 

E- Le Conseil Général, La Charte Forestière de Territoire et le timide retour de la Forêt de protection.

 

Au mois de Mai 2003, des coupes de chênes abusives en forêt donnèrent l’occasion à l’association Bassin d’Arcachon Ecologie et au Conseiller Général (qui n’avaient pas été invités aux précédentes réunions par les propriétaires) de reprendre la main en déposant plainte contre des usagers. Cette initiative à laquelle s’était associée l’élu testerin responsable de l’environnement (que le Maire fut obligé de désavouer !) créa une certaine confusion.

 

Alors que les réunions organisés par les propriétaires se poursuivaient et auraient pu, éventuellement, déboucher sur des propositions, le Conseiller Général, dramatisa la situation en parlant, dans un dossier de deux pages du journal local La Dépêche[51]


intitulé « Non assistance à forêt en danger » de « forêt mutilée, torturée, oubliée » dénonçant « l’immobilisme de l’Administration », « la conduite de certains…qui sous couvert de l’usage effectuent de véritables saignées… dans le but de faire commerce de volumes  énormes de bois », « les pratiquants (de 4x4) hors la loi qui s’autorisent à infliger à la faune, à la flore, au promeneur, l’épreuve du bruit, du dérangement, de la peur, de l’écrasement végétal »…

Cette charge mélangeait ce qui se passait en forêt usagère et dans d’autres parties du site classé : extensions de villas sur les bords du lac, safaris nocturnes avec projecteurs dans la vallée de l’Eden….

 

Elle eut cependant le mérite de court-circuiter les initiatives des propriétaires, de mettre semble-t-il, la municipalité de La Teste devant le fait accompli et, en écrivant au Ministre, Madame Bachelot, de relancer la Préfecture

 

C’est ainsi que le 24 Juin 2003, Monsieur le Sous Préfet réunit, en Mairie de La Teste, les différents participants. Il aurait fallu, bien évidemment, connaître les tentatives de conciliation précédentes et les raisons pour lesquelles elles avaient échoué, être au fait de la situation juridique particulière de cette forêt, avoir une idée précise des buts à atteindre, c’est à dire  dominer le sujet. Malheureusement cette réunion ne fut pas préparée et tourna, c’était attendu, au dialogue de sourds plus ou moins ponctué d’invectives diverses.

Cette situation servit une fois de plus de prétexte pour que le Comité de gestion que préconisait la municipalité dans l’esprit de ce qui avait été ébauché en 1998 et discuté avec la DIREN en 2001 ne voit  pas le jour. Nouvelle occasion de perdue ! Par contre cet échec, prévisible faute de préparation sérieuse, ouvrait la voie à une autre proposition : la charte forestière de territoire.

 

Au lieu de privilégier la discussion entre les acteurs locaux et de servir d’arbitre entre eux  pour les convaincre d’aller à petits pas vers des expérimentations concrètes de gestion, sans toucher au statut, mais en révisant les règles de partage, c’est la voie administrative qui fut privilégiée en choisissant la solution que la dernière loi forestière avait imaginée : la charte forestière de territoire.

 

En effet, le 11 Juillet 2001 avait été publié au Journal Officiel la nouvelle loi sur la politique forestière qui selon son article 1 « relevait  de la compétence de l’Etat » et précisait que « les collectivités territoriales peuvent passer des contrats avec l’Etat, notamment dans le cadre des chartes forestières de territoire »

C’est l’actuel article L 12 du Code Forestier qui précise de quoi il s’agit (j’ai souligné les passages qui collent à la situation de la forêt usagère):

 

   « Sur un territoire pertinent au regard des objectifs poursuivis, une charte forestière de territoire peut être établie afin de mener un programme d'actions pluriannuel intégrant, le cas échéant, la multifonctionnalité des forêts locales et visant :
   - soit à garantir la satisfaction de demandes environnementales ou sociales particulières concernant la gestion des forêts et des espaces naturels qui leur sont connexes ;
   - soit à contribuer à l'emploi et à l'aménagement rural, notamment par le renforcement des liens entre les agglomérations et les massifs forestiers ;
   - soit à favoriser le regroupement technique et économique des propriétaires forestiers, la restructuration foncière ou
la gestion groupée à l'échelle d'un massif forestier ;
   - soit à renforcer la compétitivité de la filière de production, de récolte, de transformation et de valorisation des produits forestiers.
   La charte peut être élaborée à l'initiative d'élus des collectivités concernées.
   Cette charte donne lieu à des conventions conclues entre, d'une part, un ou des propriétaires forestiers, leurs mandataires ou leurs organisations représentatives et, d'autre part, des opérateurs économiques ou leurs organisations représentatives, des établissements publics, des associations d'usagers de la forêt ou de protection de l'environnement, des collectivités territoriales ou l'Etat. Ces conventions, sous réserve du respect des dispositions du présent code, peuvent donner lieu à des aides publiques en contrepartie des services économiques, environnementaux et sociaux rendus par la forêt lorsqu'ils induisent des contraintes particulières ou des surcoûts d'investissement et de gestion. »

C’est, en l’absence de tout débat local,  l’application de cette loi qui fut choisie le 13 Octobre 2003 lors d’une réunion entre les administrations (DIREN. DDA. SIRDPC[52].ONF) et les élus (Maire de La Teste et Conseiller Général) organisée par Monsieur le Sous Préfet.



L’information fut révélée au public trois mois plus tard[53] par Monsieur le Conseiller Général annonçant par la même occasion que l’assemblée départementale avait accepté  « de se charger d’une étude afin d’élaborer cette charte » et que l’Etat accordait une subvention de 30.000 euros.



Ainsi, sans consultation de la commission de la forêt ni du Conseil Municipal, le sort de la forêt usagère avait été décidé. Une seule chose avait été négligée : le Code Forestier, dont la charte devait respecter les dispositions, ne s’applique toujours pas à la forêt usagère !

Comment en effet des propriétaires qui n’ont, en ce qui concerne les arbres, pas plus de droits que les autres usagers pourraient-ils conclure des conventions puisqu’ils n’ont actuellement qu’une simple maîtrise du sol et des cabanes, très limitée d’ailleurs par tous les règlements qui s’appliquent au massif.

Cette décision était d’autant plus surprenante qu’au mois d’Octobre la DIREN avait de nouveau proposé le statut de forêt de protection !

Il a été dit plus haut que ce  retour s’expliquant par le fait que le Conseil d’Etat avait admis, pour la forêt de Fontainebleau, la compatibilité entre forages pétroliers et forêt de protection, levant ainsi l’obstacle qui, lorsqu’elle avait été proposée par le Comité Permanent du Conseil Supérieur de la Nature en I981, avait empêché qu’on applique ce statut à la forêt usagère de La Teste !

De toutes façons, les décisions n’étant plus désormais prises au niveau local, il faut reconnaître que cette proposition de la DIREN était beaucoup plus logique sur le plan juridique puisqu’elle pouvait s’appliquer quel que soit le propriétaire et même à des forêts non soumises au code forestier, ce qui était le cas de la forêt usagère. De plus la procédure pouvait être immédiatement lancée puisque cela avait déjà été décidé au niveau ministériel en 1980. Etant donnée l’obstination des parties concernées et l’impossibilité d’arriver à un accord, cette solution aurait peut-être  été la meilleure.

Mais il y  avait  un nouveau candidat un  pour se charger  de ce dossier, le Conseil Général. Un appel d’offre[54] fut donc rédigé définissant la procédure, les buts, les moyens et le calendrier.



Le chargé d’études devait au bout de trois mois présenter un diagnostic exhaustif portant sur -les éléments généraux (foncier, voirie, occupation du sol, statuts de protection, mode de gestion...)

-l’écosystème et sa fonction environnementale (analyse des peuplements et des paysages et de leur dynamique d’évolution…)

-les activités économiques : analyse historique de l’utilisation de la ressource  et son état actuel, analyse sylvicole des peuplements (âge, volume,  état sanitaire, dynamique) en fouillant particulièrement la dynamique des peuplements de la forêt usagère afin d’avoir des données objectives pour les futures discussions entre propriétaires et usagers.

-la fonction socioculturelle notamment dans la forêt usagère : analyse paysagère poussée, analyse de l’archéologie et de l’histoire de la forêt, analyse poussée de l’utilisation sociale (accueil du public, chasse, randonnées…), examen des déprédations commises.

-l’aménagement du territoire : analyse basée sur la problématique des feux de forêt, à l’urbanisation alentour, à la fréquentation touristique.

 

Ce travail effectué en 3 mois , avec l’aide et sous le contrôle d’un « comité restreint » (Conseil Général, Commune, Sous  Préfet d’Arcachon, DDAF et DIREN) et de son « groupe technique de suivi », commence alors le processus de présentation aux deux comités (Juin Juillet) puis le travail avec le comité élargi (Juillet à Novembre) afin d’établir la charte en concertation avec l’ensemble des partenaires institutionnels (monde du tourisme, protection de l’environnement, culture, patrimoine, économie), les représentants des usagers… ; ceci sous la forme de groupes thématiques, d’ateliers, de réunions publiques, de visites de terrain… L’analyse devait déboucher sur des propositions concrètes (Décembre 2005 à Janvier 2006)

Ce travail de 11 mois, portait non pas sur les seuls 3800 hectares de la forêt usagère (là où se posaient les problèmes) mais sur les 6000 hectares du site classé !

Un an plus tard, dans le bulletin de Décembre 2005 du journal « Votre canton », pas un mot sur l’étude ni sur la charte forestière ; un rectificatif à l’appel d’offre  avait été publié le 10 mai 2005 faisant commencer l’étude en Juin 2005 pour qu’elle soit terminée en Juin 2006. Mais il n’y eut pas de suite…

Cette charte, imprudemment initiée ou acceptée par les élus, devait s’appliquer à l’ensemble du site classé. Les ayant-pins avaient donc tout intérêt, dans le cadre de leur coopérative, à lier leur sort à celui des propriétaires des forêts semées sur les dunes modernes (qui n’ont rien à voir avec la forêt usagère) afin d’obtenir un mode de gestion identique[55]


                 Cependant, les divagations de plus en plus fréquentes de véhicules 4x4, de motos et de quads, l’organisation de rave-parties dans certaines clairières, la volonté des propriétaires de faire payer les visites organisées, celle des usagers d’être les seuls, avec les chasseurs, à pouvoir pénétrer en forêt, et, comme les Verts et assimilés, d’empêcher la réalisation de pistes cyclables[56] et de sentiers balisés, tout cela conduisit les autorités préfectorales à se saisir du dossier de la fréquentation en forêt.

 

F- L’arrêté préfectoral de Novembre 2005

 

Après concertation locale, organisée par Monsieur le Sous Préfet avec  différents partenaires (1 Juin 2005), puis avis de la Commission Départementale des Sites (22 Juin), un arrêté fut signé le 14 Novembre 2005 mais ni la commission de la forêt de La Teste, ni le conseil municipal n’eurent à en débattre.

 Il concernait l’ensemble du site classé mais je n’en ai retenu que ce qui concerne la Forêt usagère.

 

 

Article 2 : «  TRAVAUX ET AMENAGEMENTS

 

- Tous les travaux sont interdits. Le site classé ne peut être détérioré ni modifié dans son état ou son aspect.

- A titre exceptionnel des travaux qui ne portent pas atteinte à l'état ou l'aspect du site peuvent faire l'objet d'une autorisation spéciale délivrée par le Ministre de l'Ecologie et du Développement durable ou par le Préfet après avis obligatoire de la Commission départementale des Sites en application de la circulaire ministérielle du 19 décembre 1988 susvisée.

 

-         LES OPERATIONS DE GESTION FORESTIERES

 

Les opérations d'entretien courant et de prélèvement de bois de pins verts ou de chênes vifs pour l'usage personnel des titulaires du droit d'usage ne sont pas soumises à autorisation.

 

Article 3 : CIRCULATION ET STATIONNEMENT

 

(Cette partie reprend les termes de la circulaire ministérielle du 6 Septembre 2005 en l’adaptant aux conditions locales).

 La circulation et le stationnement des véhicules à moteur sont strictement interdits en dehors des routes et des voies ouvertes à la circulation publique, constituées par les routes départementales 218 et 259, la piste 214, les voies d'accès aux lotissements situées en site inscrit, les voies d'accès aux plages ainsi que les parkings de stationnement publics.

 

Cette interdiction ne s'applique pas:

- aux véhicules de secours et de police, aux véhicules de surveillance et de sécurité des plages ainsi qu'aux véhicules des agents des administrations, des services publics et organismes publics dans l'exercice de leur profession ou dans le cadre de leur mission,

- aux véhicules utilisés à des fins professionnelles de recherche, d'exploitation ou d'entretien des espaces naturels,

- aux véhicules de chantier, aux véhicules et appareils agricoles, aux véhicules et matériels d'exploitation et de travaux forestiers, aux véhicules et matériels de travaux publics utilisés à des fins professionnelles à condition que ces engins répondent aux normes édictées pour chaque catégorie et soient équipés de manière réglementaire,

- aux véhicules des propriétaires de biens inclus dans ces secteurs, des sylviculteurs et ayant-droits dans l'exercice de leur profession ou activité,

- aux véhicules des tenants du droit d'usage régi par les Baillettes et les Transactions à l'intérieur du périmètre de la forêt usagère et des titulaires d'un droit ou d'une concession, dans la pratique de leur droit ou concession. Ces véhicules ne sont pas autorisés à quitter les chemins pour pénétrer à même le boisement. Le stationnement des véhicules s'effectuera obligatoirement au bord des chemins.

 

Article 4

 

Il est strictement interdit aux personnes qui sont autorisées à circuler ou à stationner à titre dérogatoire de:

- rouler à une vitesse excessive et inadaptée, compte tenu de la fragilité du milieu

-se livrer à des actions de chasse, de pêche non prévues aux statuts ou règlements particuliers régissant ces activités.

 

Article 5 : RASSEMBLEMENTS ET EPREUVES SPORTIVES

 

Tout rassemblement festif, notamment à caractère musical, est interdit en raison des risques d'incendie générés, des difficultés d'accès et de mise en œuvre des secours, des atteintes à l'état ou l'aspect du site et des problèmes d'hygiène.

Les rassemblements ou attroupements à caractère privé, impliquant une forte concentration d'engins motorisés sont interdits en raison des risques d'atteintes au milieu naturel.

Toute épreuve ou compétition sportive (courses cyclistes et pédestres) organisée par des clubs sportifs ou des associations demeure subordonnée à une autorisation délivrée par le représentant de l'Etat après accord des propriétaires du sol concernés en application des dispositions du décret du 23 décembre 1958 et de l'arrêté ministériel du 17 février 1961 susvisés.

Les marches et les randonnées pédestres dans les lieux non ouverts à la circulation publique ainsi que toute manifestation organisée par des clubs sportifs ou des associations sont soumises à déclaration auprès du représentant de l'Etat après accord des propriétaires du sol.

 

Article 6 : SPORT EQUESTRE

 

La pratique du sport équestre est interdite dans le massif forestier hors des voies ouvertes à la circulation publique.

Des promenades hippiques pourront cependant être autorisées à titre exceptionnel à l'intérieur du périmètre considéré. Elles devront faire l'objet de la part des organisateurs civils ou militaires d'une demande écrite auprès du Maire de la commune de La Teste de Buch accompagnée d'un dossier comprenant notamment le parcours envisagé ainsi que l'autorisation de passage du (ou des) propriétaires du sol, de leurs préposés ou représentants.

 

Article 7

 

Les infractions aux dispositions du présent arrêté seront constatées par tous agents habilités à cet effet et les contrevenants s'exposent aux peines et sanctions prévues par les lois et règlements en vigueur (annexe 2).

 

Article 8

 

Le présent arrêté sera affiché à la mairie de la Teste de Buch, aux mairies annexes du Pyla et de Cazaux, et en tout lieu qui sera jugé utile. Des panneaux faisant référence à cet arrêté seront apposés aux abords du site classé et du site inscrit de la commune.

 

Article 9

 

Le Secrétaire Général de la Préfecture de la Gironde, le Sous-préfet chargé du Bassin d'Arcachon, le Directeur Régional de l'Environnement, le Directeur de l'agence ONF de Bordeaux, le Commissaire Principal de Police d'Arcachon- la Teste de Buch, le Maire de la Teste de Buch et tout agent commissionné au titre du code de l'environnement, sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l'exécution du présent arrêté qui sera publié au recueil des actes administratifs de la Préfecture de la Gironde.

 

BORDEAUX, le 14 NOV 2005 LE PREFET, Francis IDRAC

 

Pour la première fois, le représentant de l’Etat reconnaissait les « baillettes et transactions » et du même coup, mais sans le dire, le fait qu’il n’y avait pas de propriétaires au sens plein du terme mais seulement des « usagers privilégiés » propriétaires non des arbres mais du sol, des cabanes et de la gemme et qu’on ne pouvait rien y faire sans une nouvelle transaction ou…un cantonnement désormais aléatoire.

Prudent, le texte ne se prononçait pas sur l’usage des chênes vifs ce qui permit à l’ADDU-FU de s’appuyer sur cet arrêté pour inciter la population à en couper pour le chauffage[57] entraînant la réplique immédiate des propriétaires[58]


rappelant qu’il fallait une autorisation.

De même s’en est-on tenu à la formule légale pour autoriser « l’entretien courant », ce qui promet de belles joutes oratoires devant les tribunaux car ce que permettent les transactions est, on l’a vu, beaucoup plus restrictif que ce qu’entend la loi.

Pour le reste ce n’était que la reprise de l’arrêté municipal de 1985, qu’il aurait fallu faire appliquer, remis au goût du jour (raves, quads…) mais sans interdictions nouvelles de circulation automobile puisqu’il fallait bien satisfaire tout le monde (chasseurs, propriétaires, usagers testerins, arcachonnais, gujanais et ferret-capiens, ce qui, je l’avais déjà signalé, fait beaucoup mais beaucoup de monde !). Il y avait  parfois des obligations nouvelles telles que l’interdiction de stationner en dehors des sentiers, interdiction savoureuse quand on en connaît l’étroitesse.

                     C’est à la suite des réunions préparatoires qu’eurent lieu de vifs échanges épistolaires entre le Conseiller Général et le syndic des propriétaires. Cette polémique portait sur le droit des propriétaires à contrôler le passage, droit que l’auteur leur déniait affirmant à propos de l’arrêté préfectoral : « Je n'ai pas constaté que les propriétaires ou, le syndic des propriétaires, étaient inves­tis d'une quelconque charge de contrôle permettant à ces derniers d'accomplir l'ancienne coutume qui  mettait autrefois la personne humaine à la merci des hobereaux locaux pour le droit de passage sur leurs terres[59] ».



                   Le problème est très complexe : dans l’arrêté préfectoral leur autorisation doit être sollicitée en cas d’organisation de manifestations (Articles 6 et 7), mais, alors que dans le cas de manifestations équestres ce sont les propriétaires ou leurs  représentants qui doivent la donner (comme en 1985),  dans le cas des manifestations sportives, des marches ou des randonnées pédestres c’est l’accord des  propriétaires (et non de leurs représentants) qui doit être sollicité.

Etant donné le nombre de propriétaires, l’organisation d’une randonnée devient extrêmement difficile vu le nombre de personnes à solliciter. Cette rédaction risque donc , dans la pratique, étant donnée la complexité du foncier, de limiter grandement ce genre d’activités. C’est d’ailleurs très souvent le cas d’autant que le garde des propriétaires appliquerait d’après certains, les règlements de façon pointilleuse.

Les conflits deviennent d’ailleurs d’autant plus aigus que la négociation d’une nouvelle transaction a, on le verra, échoué entrainant l’abandon des  solutions envisagées. Le point culminant a été atteint le 16 octobre 2011, avec l’organisation d’une manifestation des randonneurs et des associations qui les soutiennent.

 

De plus d’après la loi, même si le « propriétaire » a le droit d’interdire la circulation sur des chemins d’exploitation et de se clore (article 647 du code civil), , il doit laisser le passage pour les propriétés enclavées qui ne peuvent sortir que par le chemin qui passe chez lui (art.682) et respecter la liberté des ayant-droits ; ces textes  ne s’appliquent d’ailleurs pas à la forêt usagère  où les clôtures sont interdites sauf pour la cabane et le jardin du résinier.

Cette rédaction risque, dans la pratique, étant donnée la complexité du foncier, de limiter grandement ce genre d’activités.

Enfin ces articles, rajoutés en 2005, s’appuient sur des textes[60] concernant


« toute épreuve, compétition ou manifestation de caractère sportif  comportant la participation de véhicules à moteur », organisées en présence et pour du public ( !) qui nécessitent une autorisation administrative, ce qui n’a rien à voir avec les marches et randonnées pédestres !

Reste qu’en cas d’accident (chute de branches…)  les propriétaires arguent du fait qu’ils sont responsables, mais comme ils n’ont pas, on l’a vu, la propriété des arbres et que faute d’une nouvelle transaction (impossible tant que le cas gujanais n’est pas réglé) aucun entretien ne peut être effectué, le problème ne pourra se régler que dans le cadre d’une convention passée avec la collectivité locale.

    Depuis deux sortes de panneaux ont fleuri sur les entrées de chemin :

- l’un  précise « Chemin forestier. circulation interdite sauf aux ayant-droits », il est donc conforme aux termes de l’arrêté mais ne le mentionne pas (contrairement à son article 8) et n’indique pas non plus de quelle autorité il émane ;

 - l’autre plus restrictif (présent surtout dans le reste du site classé car il semble qu’en forêt usagère, où il en reste, certains aient « disparu ») est ainsi libellé : « Circulation interdite sauf riverains. (Loi 91-2 du 3 Janvier 1991- Articles 322-1 et 333-3 du Code Forestier ».

Quel que soit son lieu d’implantation ce second panneau présente des irrégularités :

-pas d’indication de l’autorité qui l’a posé (alors que des interdictions officielles  ne peuvent relever que du Préfet (site classé) ou du Maire.

-allusion à des textes inadaptés : la forêt usagère ne relève pas du code forestier quant à la loi de 1991 elle précise qu’elle n’est « pas opposable aux propriétaires et à leurs ayant-droits»  mention que le panneau« oublie » !                                                                                             

-pas de référence à l’arrêté préfectoral  de Novembre 2005 pourtant négocié par toutes les parties prenantes

 

Cela montre une fois de plus, que ce territoire est une zone de non-droit puisque n’importe qui peut y imposer ses propres lois en contradiction avec les règles officielles à la définition desquelles il a pourtant participé.

 

Carte des limites actuelles de la forêt usagère (jaune) comparées à celles de l’arrêté préfectoral (en pointillés)

zone de préemption) du Conservatoire du littoral (++++)[61]



                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                        

De plus les limites du massif usager  ne correspondent pas aux limites réelles[62].


 

Un autre aspect de cet arrêté c’est que la carte qui lui a été annexée, bien que préparée par la DIREN,  est inexacte. En effet le classement de 1943 (pourtant repris dans celui de 1994), n’a pas été mentionné.  Ainsi les parcelles de Menoy, Arraoucs, Baillons, Hourn Peyran et Lartigon et la zone usagère du nord de la dune du Pyla), ne font plus partie, sur ce document de la Forêt Usagère !

Le fait a d’ailleurs été signalé  à Monsieur le Préfet par une lettre, restée sans réponse, du 28 Février 2006.

            


             Les propriétaires, lors de leur assemblée du 21 octobre 2006, ont contesté le paragraphe sur la gestion forestière et proposé à la DIREN, le 13 Octobre 2006, un  « protocole » pouvant servir de base à la délivrance ou à la révision des plans simples de gestion.

            

 

G-La modification du Plan d’Occupation des sols

 

Jusqu’en 2007 le projet de modification de l’article concernant les constructions a pu être bloqué  mais dans la version 2007 du PLU[63],si, comme dans les autres forêts, la reconstruction n’est autorisée  « à l’identique  qu’après sinistre » on peut se demander pourquoi la forêt usagère bénéficie d’un traitement plus laxiste quand au nombre de cabanes reconstructibles tout en restant, comme en 1978, très contraignant quant à leur superficie.


il est en effet précisé ceci : « les cabanes forestières répertoriées sur la carte de Durègne, ayant disparu, pourront être reconstruites, à condition que les vestiges soient encore visibles sur le site » et, dans ce cas, elles ne pourront dépasser 8 mètres sur 4, le jardin attenant, d’une superficie de 500 m2, pouvant être clôturé.

         Cet article remplace celui qui fut en vigueur de 1978 à ce jour dont les  restrictions ont donc disparu à la demande conjointe de l’ADDU-FU et des propriétaires . Ceux-ci, en effet,  dans leur Assemblée générale du 10 Juin 2006, firent la même demande, chargeant l’ancien président de… l’ADDU-FU, lui même propriétaire, d’accompagner le Maire de La Teste dans son recensement des cabanes. 

 

L’extrait ci-dessus de la carte de Durègne (partie nord-est de la forêt) montre un exemple des  excès auxquels il sera possible d’aboutir puisque sont entourées les neuf cabanes qui existaient lors de la parution du premier plan d’occupation des sols en 1978, seules concernées par une reconstruction après un éventuel sinistre, les 7 autres ne pouvant légalement l’être. Or le PLU actuel en permettrait donc 16, avec, étant donnée la proximité des deux parcelles du Becquet, la constitution d’un véritable hameau.

 

Cette rédaction est donc très dangereuse d’autant que  le recensement de tous les  « vestiges encore visibles » a déjà été effectué par des « archéologues » privés ; on pourrait à terme avoir, dans ce massif classé[64] protégé depuis 1978 de toute urbanisation intempestive, plus  de 100 pied à terre  avec tout le cortège de nuisances  automobiles que cela entraînera , alors qu’en 1972 il y en avait déjà 63. En effet des cabanes ont été construites depuis 1901.



Depuis les dernières élections municipales, marquées par la défaite de l’équipe sortante, le PLU a été annulé, mis en révision puis de nouveau approuvé le 6 octobre 2011. Malheureusement  les nouveaux élus ne se sont pas  rendu compte du danger que la rédaction 2007, faisait peser et au lieu de conserver sagement l’ancienne rédaction, dont les dispositions avaient été, ces dernières années, utilisées par les tribunaux pour faire  échec à des demandes de construction, ils ont maintenu les dispositions de 2007. La seule nouveauté, elle est importante, c’est la réalisation d’un inventaire photographique des cabanes existantes destiné à éviter, après sinistre, toute reconstruction abusive

 

Par contre la référence, dans ce PLU, à l’article R 146-2 du Code d’urbanisme semble témoigner d’un changement louable d’attitude puisqu’il autorise, après enquête et accord de la commission départementale des sites, des cheminements pour piétons, des pistes cyclables et des sentes équestres, toutes choses que nous préconisions dès 1978 mais qu’aucune municipalité, y compris l’actuelle, n’avait encore osé proposer. Il faut cependant noter que l’association Bassin d’Arcachon Ecologie continue à s’opposer « à des chemins balisés[65] ».



 

 

IV La situation fin 2007

 

En cette année 2007, la situation semblait insoluble : toute gestion forestière autre que le prélèvement usager était bloquée soit par l’arrêté préfectoral soit par les jurisprudences s’appuyant sur les transactions en vigueur, et les positions des uns et des autres semblaient inconciliables.

On a vu plus haut celles du Conseil Général et celle de la DIREN. Au niveau local, voici les prises de position publiques des deux associations les plus impliquées :

 

A- La position de l’ADDU-FU.

 

Il semble que la nouvelle équipe ait renoncé à ses propositions antérieures de gestion en privilégiant le statu quo usager tout en entretenant une relation très étroite avec la municipalité, ce que le Maire se plut d’ailleurs à souligner  en déclarant : « Par ce changement de présidence, j’espère que les échanges seront plus courtois, plus constructifs » [66]


Sa position est définie sur son  site internet qu’elle invite régulièrement à consulter [67]  , elle y souhaite  en particulier l’engagement des municipalités sur« l’arrêt de toute procédure de cantonnement » et « le rétablissement du mode de gestion légal de cette institution…qui a permis la régénération naturelle de cette forêt depuis plusieurs siècles en préservant les logiques économiques coutumières ainsi que l'équilibre écologique »
Elle y affirme aussi que les usagers sont tous ceux qui habitent le territoire de l’ancien Captalat.


Ce texte appelle cependant quelques remarques :

-l’abandon de la procédure de cantonnement ne dépend ni des administratifs ni des politiques mais des seuls propriétaires encore que, on l’a vu, le cantonnement judiciaire soit pour le moment en suspens.

-actuellement, le cantonnement amiable de Gujan a été approuvé par le Tribunal. Si la Cour d’appel (puisque la commune de La Teste a décidé de poursuivre) confirme le jugement les gujanais ne seront plus usagers. Il faudra donc signer une nouvelle  transaction entre les propriétaires et la seule Mairie de La Teste, à moins, comme on, l’a vu plus haut que les gujanais ne trouvent, avec les propriétaires, une solution pour renoncer à leur propre cantonnement.

-les arcachonnais ne sont plus, on l’a expliqué, bénéficiaires du droit d’usage en bois d’œuvre puisque la commune s’est après son indépendance,  retirée de fait de l’institution.

- A l’origine, les droits avaient été accordés à l’ensemble des habitants du Captalat, mais les transactions étant des actes notariés qui engagent les parties, et qui ont été contractuellement modifiées au cours des temps, il ne faut pas oublier que celle de 1955 , les avaient limités aux habitants de La Teste et de Gujan et qu’elle n’a pas été attaquée en justice, ce qui semble régler le cas d’Arcachon . Par contre le maire de Lège dont certains  habitants du Cap Ferret ont encore droit au bois d’œuvre devra être partie lors d’une nouvelle transaction.

-la régénération naturelle de cette forêt a été permise au cours des siècles par le fait que les coupes de pins étaient importantes et laissaient dans le massif des trouées de lumière où les jeunes se développaient naturellement (encore que lors des derniers grands incendies le réensemencement ait été aidé, ce qui est possible aussi pour les plus anciens).

En conséquence, pour que la forêt se régénère sur une durée raisonnable, encore faudrait-il qu’on retrouve les niveaux de prélèvement d’antan.

 

Mais, l’autre position dont il faudra tenir compte, étant donné l’influence qu’ils ont prise, c’est celle des membres de l’association BAE.

 

B-   La position de Bassin d’Arcachon Ecologie.

 

Le texte qui expose sa position a été rédigé par  l’actuelle présidente de BAE  et publié en Septembre 2005, avec son accord, sur le site internet public « Bassin d’Arcachon.com » où il peut être consulté.

Sous le titre  «  La Forêt usagère est en pleine santé ! » il développe une thèse selon laquelle le développement des forêts se fait en suivant un  cycle naturel passant d’une phase jeune à une phase adulte puis, après la maturité, à la vieillesse « où les arbres sénescents ou morts ouvrent à nouveau le peuplement »  à laquelle succèdera naturellement « une longue phase de rajeunissement où le milieu ouvert permet une abondante régénération » mais que « la Forêt usagère, loin d'être monobloc, englobe dans ses divers territoires en mosaïque, toutes les phases mentionnées ci-avant, y compris des phases très jeunes. »
Soulignant les rapports entre bois morts, insectes xylophages et champignons dont « la présence n'est pas symptomatique d'une dégradation maladive du boisement mais prouve au contraire que la chaîne vitale de cet écosystème est saine et sans faille et  garantit l'inutilité du moindre traitement phytosanitaire », il insiste sur l’intérêt du sous bois et de ses «  espèces à baies (chèvrefeuille, ronce, aubépine, prunellier, houx, troène, églantier, lierre) qui, de saison en saison, nourrissent les animaux…  sous-bois dense qui stocke l'humidité et joue un rôle préventif vis-à-vis de l'incendie. »
 Il salue d’autre part la disparition du  gemmage.  « Son arrêt permet aux feuillus d'être plus présents. Le boisement bénéficie ainsi d'une plus grande mixité et d'une biodiversité accrue. Et ce peuplement de résineux et feuillus, au fil des décennies, s'orientera peut-être vers une chênaie acidiphile »

Ces écologistes, dont la sincérité n’est pas en doute, semblent vouloir laisser faire la nature tout en admettant le prélèvement usager en « jardinage » qu’ils considèrent, avec raison, comme une méthode préservant la diversité biologique du massif.  
Mais ce n’est pas si simple car la situation actuelle  de la forêt usagère est, on l’a vu, le résultat d'une Histoire, d'un équilibre longtemps maintenu (mais plus aujourd'hui) entre les différents partenaires, propriétaires et usagers.

Son aspect "naturel" est donc la conséquence de la volonté des générations qui nous ont précédées et de la façon dont ils l'ont gérée et plus précisément, depuis quelques décennies, de l'impossibilité dans laquelle se trouvent les partenaires de s'entendre et de concilier leurs intérêts divergents.


C- La position de la municipalité de La Teste et le nouveau rôle de l’ADDU-FU

 

Dans le  bulletin municipal distribué dans toutes les boites aux lettres en Octobre 2005 on qualifiait d’usagers « l’ensemble des habitants en résidence principale depuis plus de 10 ans sur l’ancien territoire du Captalat ». Cette affirmation accrédite la thèse selon laquelle ils auraient tous les mêmes droits, ce qui, on l’a vu est contesté.

De même l’indication selon laquelle « le code forestier ne s’y applique pas », ce qui est vrai, contredit l’acceptation par cette même municipalité de la Charte forestière de Territoire qui doit en respecter les prescriptions !

Enfin l’insertion d’un encart consacré à  l’ADDU-FU  qui « en coopération avec la Ville, organise et facilite l’exercice des droits d’usage » et « traite les dossiers de demande de bois d’œuvre et le sciage en forêt » donne l’impression d’une délégation de fait des pouvoirs municipaux à une association loi 1901.

Celui qui traite les dossiers de demande de bois est en effet le syndic des usagers nommé (ainsi que  son adjoint) par le Conseil Municipal. Par cette élection, il a en fait reçu délégation des pouvoirs du Maire qui est le représentant légal des seuls usagers testerins.

S’il est souhaitable qu’une association collabore avec la municipalité, il ne doit pas y avoir confusion des pouvoirs Cette évolution semble en effet contraire aux textes des transactions et l’on peut donc se  demander si elle est  juridiquement soutenable.

 

Cette nouvelle orientation a été confirmée en 2006 puisque le journal Sud-ouest([68])a annoncé  que, lors de l’Assemblée Générale de l’association, il avait été décidé la création d’un « pôle forestier » au Natus,  sur un terrain que « la mairie de La Teste met gracieusement »  à sa disposition.



Ce terrain est celui de l’ancienne décharge qui a été réhabilité par la COBAS (Communauté des 4 communes du Sud Bassin).

 Il a été précisé par l’ADDU-FU «  nous assurerons la gestion du bois d’œuvre, du bois de chauffage…et un exploitant forestier assurera le débardage et le sciage de ce bois d’œuvre mais assurera aussi le nettoyage de la forêt ».

Ce projet supposait un appui des collectivités car le budget provisionnel avait été établi à 122.500 euros.( [69])


La COBAS a voté une subvention de 24.500 euros alors que la Forêt Usagère ne concerne, à des titres divers, que les communes de l’ancien Captalat et non celle du Teich dont le Maire préside la COBAS.


Le Conseil Général a suivi avec 24.500 euros([70]), le Conseil Régional avec 24.500 euros([71]) et l’Etat a lui aussi été sollicité et a accordé par le biais du Ministère de l’environnement la somme de 15.000 euros.

Quant à Madame la Député -Maire de Gujan, elle a participé elle aussi grâce à sa dotation parlementaire, alors que Gujan a cantonné !


Le pôle forestier a été inauguré le 28 Avril 2007 et un bail emphytéotique, renouvelable par tacite reconduction, a été accepté pour une durée de 30 ans par le conseil Municipal de la Teste le 22 Décembre 2007. Il concerne une superficie de 2 hectares et a été accordé contre le loyer symbolique de 1 euro par an, les travaux et la construction des bâtiments (3 bâtiments destinés à l’accueil du public, un bloc sanitaire et un hangar pour le matériel de sciage) étant à la charge de l’ADDU-FU, pour un coût estimé de 157 797,85  euros et devant être terminés le 31 Décembre 2013. Ces équipements revenant au bout de 30 ans à la commune.

 

Or, d’après les textes, le droit au bois de chauffage est un droit personnel, strictement encadré en ce qui concerne les espèces concernées, et donc, comme d’ailleurs le droit au bois d’œuvre, il ne peut être géré par une association.

C’est pourquoi, pour le moment, si chaque mois, d’Octobre à Mars, la sélection des arbres est faite par l’ADDU-FU « en concertation avec les syndics » et que celle-ci assure les coupes et le sciage([72]), ce sont toujours les syndics qui accordent les autorisations.


On n’en est pas encore à ce qu’elle réclamait  en 1999, c'est-à-dire le pouvoir de désigner les syndics usagers, mais lors de leur récent renouvellement,  sur les 3 candidatures présentées au Conseil Municipal, celle d’un ancien syndic, opposé, dans le passé, à l’ADDU-FU, n’a pas été soumise au vote.( [73]) Il semble d’ailleurs, à lire les derniers articles de presse,([74]) que l’osmose entre les nouveaux syndics des usagers testerins et l’association soit réalisée puisque c’est elle qui organise les campagnes d’abattage « au profit des usagers de l’ancien territoire du Captalat, conformément à ses statuts modifiés en Février 2007([75]), à l’exception des demandes gujanaises » et que c’est à elle que les demandeurs sont invités à s’adresser.


Ce pôle forestier qui est aussi un outil de sensibilisation et d’information auprès des adultes et des enfants est complété par la Cabane d’Arnaud, parcelle achetée par la municipalité et gérée par l’ADDU-FU qui a commencé par y organiser des activités destinées à « perpétuer la mémoire des traditions »( [76]) telles que le gemmage et l’apiculture.



Cette municipalité, qui a, de fait, délégué ses pouvoirs à l’ADDU-FU, a été battue lors des municipales de 2008. Quelle sera la politique de la nouvelle équipe ? L’avenir le dira mais les dernières initiatives de l’Etat permettent d’esquisser quelques pistes.

 

Conclusion : De nouvelles pistes ?

 

A/ 2008 -2009 : la dernière initiative préfectorale

 

L’arrêté préfectoral sur la circulation en forêt outre ses imperfections (cartes inexactes, textes de référence inadaptés…) avait aux yeux des « ayant-pins » le défaut de reconnaître que la règle était celle des baillettes et transactions. Arguant du fait que des considérations sur la gestion n’avaient rien à faire dans un arrêté consacré essentiellement à la circulation en forêt, ils menacèrent d’aller en justice pour le faire annuler. Ils obtinrent en partie satisfaction puisque le 1 avril 2009, Monsieur le Préfet considéra que l’adoption, le 23 mars 2009, par la « Commission départementale de la nature, des sites et des paysages » du règlement ci-dessous modifia le règlement en supprimant l’article 2 qui prévoyait des règles de gestion spécifiques pour la forêt usagère.

 

C’est en effet de  janvier à décembre 2008 que 9 réunions furent consacrées à la rédaction d’un « Guide de recommandations paysagères pour la gestion forestière du massif forestier de La Teste de Buch » ([77]).

 


Ce guide, qui concerne toutes les forêts inscrites ou classées et donc la forêt usagère, fut élaboré par les représentants de l’Etat, des collectivités locales, des forestiers et des associations. Le résultat fut un « consensus sur les considérants concernant les caractères paysagers spécifiques à conserver tout en tenant compte des impératifs de l’exploitation sylvicole, ainsi que sur l’ensemble des recommandations paysagères ».

Ce guide adopté ,on l’a dit, par la Commission départementale de la nature, des paysages et des sites, le 23 Mars 2009, « n’a pas de valeur règlementaire et présente des recommandations paysagères qui n’ont pas  valeur d’obligation mais peuvent permettre une meilleure adaptation des projets au site ».

Destiné à desserrer le carcan qui pesait sur la gestion des forêts non usagères, il  concerne aussi la forêt usagère même si de temps en temps ses caractères spécifiques sont rappelés. Enfin il doit être suivi par un « Cahier d’orientation et de gestion du grand site de la dune du Pilat » et par l’élaboration du « document d’objectif (DOCOB) » qui sera élaboré dans le cadre de Natura 2000.

Ce document reconnaît que « les conditions naturelles, les contraintes de l’histoire et de l’économie ont façonné 3 faciès forestiers, soit trois types d’unités paysagères…correspondant globalement à 3 types de statuts juridiques : la forêt domaniale, la forêt privée non usagère et la forêt privée usagère ».

En ce qui concerne plus particulièrement la forêt usagère, (poussée sur dunes anciennes paraboliques, contrairement à ce qu’affirme le document) il reconnaît

-             qu’elle « se présente comme un continuum forestier de futaie vieillie, au sens sylvicole du terme, ou irrégulière », page 9 ;

-             que « la pratique actuelle courante est le prélèvement d’arbres pied par pied »

-             et que « l’étagement de la végétation, la mixité des essences, la présence d’arbres âgés et parfois morts, l’exploitation de faible intensité sans coupe rase, le renouvellement par génération naturelle, contribuent à une forte richesse biologique et écologique de ce massif »

Suite à cette succession d’affirmations qui en reconnaissent le caractère spécifique, et qui ont fait l’objet d’un consensus entre tous les participants, on s’attend à ce que des méthodes de régénération adaptées, proposées depuis des années, soient enfin préconisées.

On s’y attend d’autant plus que le Schéma Régional de gestion sylvicole des forêts privées (78)approuvé par arrêté ministériel du 21 Juin 2006,  précise qu’il y a , dans les Landes de Gascogne, s’étendant sur les départements des Landes et de la Gironde « 35000 hectares de futaies irrégulières »destinées «  à produire du bois d’œuvre de haute qualité sans jamais découvrir le sol pour éviter en particulier l’érosion et pour maintenir un niveau de biodiversité constant ».

Or après avoir affirmé que « des modes de gestion différents contribuent à maintenir les 3 faciès forestiers, facteurs de diversité paysagère », le texte précise que « la gestion de production nécessite la réalisation de coupes rases adaptées »et, plus loin,  que leur taille « sera limitée à 10 hectares maximum, éventuellement par placettes disjointes ».

Ainsi ce règlement s’obstine sous prétexte que « le site est indivisible » à traiter de la même façon une chênaie-pineraie dont l’ancienneté est avérée, et les particularités reconnues, la forêt usagère, et des espaces cultivés voués à la sylviculture du pin maritime.

Cela est d’ailleurs en contradiction avec  ce qui est dit page 7 du document :

« Proposition d’application au cas particulier de la forêt de La Teste :

 

- sont considérés comme modifiant l'aspect du site : coupes rases, coupes d'éclaircies enlevant plus de 30% du nombre des tiges, et déplacement de chemins existants

- sont considérés comme ne modifiant pas l'aspect du site : dépressages, dégagements, débroussaillements, et coupes d’éclaircies prélevant moins de 30% du nombre des tiges »

Le consensus proclamé dans le document et célébré par la presse, semble d’ailleurs assez fragile puisque dès octobre 2008, dans une revue nationale, les responsables de 2 associations participantes (Bassin d’Arcachon Ecologie et l’ADDU-FU) s’élevaient avec raison contre  ces projets de coupes rases. (79)

Quant aux ayant-pins (80), après avoir déclaré que ce texte « représente une avancée à confirmer » ils protestent contre le fait qu’il mentionne « les Baillettes et Transactions régissant le statut de la forêt usagère depuis 1468 et les jurisprudences s’y référant t »  et que le Guide précise qu’en « forêt usagère, la pratique actuelle courante est le prélèvement d’arbres pied par pied et de bois de chauffage, selon l’usage (baillettes et transactions).” Si la phrase sur le bois de chauffage est effectivement mal venue, ils oublient cependant de préciser que le texte n’a aucune valeur règlementaire .

Ils précisent aussi que « le Syndicat des propriétaires restera vigilant et attaché à trouver en priorité avec son partenaire naturel et légitime - la Commune de La Teste de Buch - les voies pour l’adaptation du statut usager aux besoins d’aujourd’hui et de demain »

 

 

B/ Vers une nouvelle transaction ?

 

Tout dépend donc de la volonté que mettra  la municipalité de La Teste à imposer un type de régénération adapté car ce texte permet cependant d’avancer. En effet si les modifications du site (les coupes rases) doivent, après le montage d’un dossier compliqué, et l’avis des différentes autorités administratives et commissions départementales faire l’objet d’une autorisation ministérielle, les coupes d’éclaircie enlevant moins de 30% des tiges ne sont pas considérées comme modifiant l’aspect du site.

Dans ce cadre le prélèvement usager peut continuer et une régénération entreprise. Pour cela cependant une nouvelle transaction est nécessaire, c’est le vœu de l’actuelle municipalité et c’est aussi, on l’a dit celui des ayant-pins,

Ce texte devra à mon sens, répondre à plusieurs exigences :

 

*garder l’esprit des textes :

S’appuyer sur les transactions est une excellente chose mais  ces transactions ne fonctionnaient  que si chaque partie en tirait des revenus : aux uns la gemme, aux autres le bois. C’était cela l’esprit des textes.

Il faudrait donc admettre que

-les ayant-pins ont droit, l’usage une fois satisfait, à des revenus qui soient au moins suffisants pour couvrir les frais, mais que l’extrême diversité des propriétés comme les caractéristiques de la forêt (relief…) réduisent les possibilités de gestion individuelle et obligent à la création d’une coopérative de propriétaires ayant-pins seule à même de recruter les techniciens aptes à pratiquer les méthodes évoquées plus haut et seule capable d’obtenir les aides et subventions nécessaires.

 

 *préciser de façon très détaillée :

- les techniques de gestion, en écoutant le diagnostic et en suivant les conseils des experts et techniciens forestiers partisans de cet objectif (81), c'est-à-dire d’une sylviculture proche de la nature apte à produire du bois d’œuvre de qualité tout en respectant la biodiversité du massif afin de parvenir à une forêt vraiment jardinée et non livrée à elle-même , tout en essayant de tenir compte des évolutions possibles dues aux changements climatiques prévisibles.

-les règles de délivrance des bois  (en particulier le problème des chênes),

-la qualité des bénéficiaires de l’usage : il faudra aussi régler une fois pour toutes les cas d’Arcachon et de la partie anciennement testerine de la presqu’île du Ferret. Le cas de Gujan étant lié au résultat des instances judiciaires en cours.  Comme les positions sur ces deux communes sont très tranchées, il faudra que la Justice dise le droit, à moins que sagement, comme nos ancêtres de 1794, on s’en remette à des arbitres indépendants et neutres.

-la part revenant aux usagers :

Actuellement les prélèvements usagers sont, on l’a vu, très faibles, mais on ne peut préjuger de l’avenir. Il faudra aussi  envisager, eu égard à la hausse constante de la population la possibilité d’une augmentation des demandes de bois d’œuvre. Cela semble improbable même, étant donnée la désaffection pour le bois de pin dans la construction de maisons, mais , si cela arrivait il faudra alors se demander s’il n’y aura pas, un jour, incompatibilité avec le maintien de la biodiversité et du paysage que tous proclament vouloir sauvegarder…

La sagesse voudrait donc qu’aucun quota ne soit fixé, comme certains l’ont, un temps envisagé, car la forêt doit rester usagère mais qu’une clause de révision soit prévue en fonction de l’évolution des demandes et des bilans financiers de la régénération.

 

* affirmer la liberté et la gratuité de circulation et de promenade ( à pied) de tous les habitants , en définir les modalités et prévoir un engagement de la commune pour l’entretien des sentiers, afin  que cette liberté ne soit pas ultérieurement remise en cause.

 

*prévoir la répartition des fonds et décider du maintien ou non de la caisse syndicale et des cotisations qu’elle percevait.

 

* préciser le rôle du « pôle forestier » restant entendu que le Maire est seul représentant des usagers et que les syndics des usagers, chargés de contrôler la délivrance des bois, ne dépendent que de lui.

Mais certaines conditions devront au préalable être remplies :

 

*accepter, enfin, les transactions (ratification de la transaction de 1759 portant modification de l’article 12), et la jurisprudence (arrêt du Conseil d’Etat de 1970  et jugements de 1976 et 1984), telles qu’elles sont et non telles qu’on les rêve, préalable indispensable pour que les ayant-pins et les représentants légaux des usagers puissent ensuite dépasser la lettre des textes pour en revenir à l’esprit.

 

*abandonner pour les uns toute idée de cantonnement ( ce qui suppose d’abandonner la procédure entamée en Août 2008) et de « mise en production par des coupes rases étendues » et accepter, pour les autres, des évolutions.

 

* subordonner, en conséquence, les intérêts privés ou collectifs à celui de la forêt, ce qui n’empêche pas d’explorer de nouvelles utilisations du massif : bois-énergie (82) , éco-tourisme maîtrisé, gemmage…

 

Cette transaction, étant données les multiples protections qui affectent le massif (sites, Natura 2000….) devra être approuvée par la Commission Départementale des Sites afin qu’elle s’inscrive dans la charte officielle du massif.

Il faudra pour cela, on l’a déjà dit, que les différentes autorités acceptent définitivement l’idée que la forêt usagère est une futaie irrégulière qui doit le rester et donc bénéficier de traitements spécifiques.

 

Nous verrons dans l’épilogue que ces buts avaient été presque tous atteints lors de la négociation d’une nouvelle transaction que malheureusement la volte face d’une des parties a réduit à néant.

 

Par contre,

 

-si l’on veut s’en tenir à des  textes rédigés à une époque où la seule destination de la forêt était la production de gemme pour les ayant-pins et de bois d’œuvre pour les usagers (non ayant-pins ou ayant-pins);

 

-si l’on veut perpétuer le déséquilibre actuel : les ayant-pins n’ont plus de revenus car il n’y a plus de gemmage et les propositions que nous avions faites en 1984 et 1989 pour relancer cette activité n’ont pas trouvé d’écho . Or ce n’est plus une utopie : en 2007  à …Biscarrosse un laboratoire bourguignon de produits de santé à la recherche de thérébentine de qualité avait envisagé  cette réintroduction. Après un projet avorté en forêt usagère, c’est  dans l’enceinte du centre d’essais des Landes, que depuis 2010 la Société Holiste, spécialiste d’aromathérapie, exploite, une parcelle ONF de 1000 pins qui a déjà produit 6 tonnes de térébentine. Ailleurs, au Porge, la société « Domaines et Patrimoine » a racheté le brevet que  Claude Courau a déposé en….1988 et commencé des expérimentations sur 50 hectares de forêt communale ainsi que sur des propriétés privées dans le sud des Landes. Claude Courau ancien gemmeur du Porge a en effet inventé un procédé d’extraction de la résine « de très haute qualité et complètement bio », le « gemmage en vase clos ». Il a d’ailleurs participé, mais sans rencontrer malheureusement d’écho,  à certaines réunions sur la forêt usagère de La Teste

D’autre part un projet européen « Sust-Forêst » est en cours d’étude pour relancer le gemmage en Aquitaine et au Portugal. Il a été  présenté le 30 Octobre 2012 à Bordeaux et les conclusions seront publiées en Mars 2013.

Comme apparemment les responsables officiels de la forêt usagère ne bougent pas, on peut craindre, malheureusement, que ces projets ne la prennent pas en compte. (83).

 

-si l’on ne veut pas dégager de ressources pour les ayant-pins et qu’on préfère s’en tenir à la lettre des textes (le « propriétaire » n’a pas plus de droits sur les arbres que l’usager) ce qui, on l’a vu, est tout à fait légal puisque confirmé par les tribunaux.

 

-si l’on veut que la forêt évolue sans intervention autrement  que par les coupes usagères pour la régénérer ;

 

-si l’institution ne peut être ranimée ;

 

Alors, comme actuellement l’institution est bloquée, comme on ne peut demander aux ayant-pins d’entretenir une forêt dont ils ne tirent rien et  comme on ne peut, légalement, en l’état actuel des textes, confier cette mission à une association qui ne représente qu’une partie des usagers potentiels, il faudrait aller jusqu’au bout : que la puissance publique (Etat ou collectivité territoriale …) rachète le sol.(84)

Ainsi le problème serait réglé, il n’y aurait plus d’ayant-pins donc plus de conflits mais il faut réfléchir aux conséquences : l’Etat ayant toujours eu une fâcheuse tendance à cantonner ses forêts pour en supprimer les droits d’usage laissant au mieux un droit d’affouage (c’est un peu ce que proposaient les ayant-pins en 2003), on peut se demander si les droits actuels seraient maintenus en l’état d’autant que, d’autre part, le code forestier interdit « toute concession de droits d’usage dans les bois et forêts relevant ou non du code forestier » !

 

Conclusion   

   

          Quelle que soit la solution trouvée, il faudra, si l’on veut  régénérer cette forêt, étant donné son état actuel et ce que cela va coûter, que les collectivités territoriales s’y impliquent financièrement :

-la commune de La Teste par le biais d’une convention d’entretien en échange de la liberté d’accès (à pied…) pour tous, ce que, on le verra dans l’épilogue, elle avait fini par accepter.

-le Conseil Général, s’il veut toujours s’en mêler, sous une forme financière à déterminer.

-l’Etat, car il ne suffit pas de classer un site et d’empiler des règlements, encore faut-il aider à sa gestion.

-L’Europe enfin puisque Natura 2000 est une directive européenne.

Mais il faudra aussi prendre garde à ce que ces aides ne se traduisent pas par une intrusion de plus en plus forte des diverses autorités. Le système doit rester contractuel à moins de vouloir en transformer complètement la nature et  tirer un trait sur des siècles d’Histoire.

J’ai montré plus haut comment de tout temps les administrations mais aussi les communes ont voulu mettre la main sur ce massif, je pense que le danger est toujours présent : outre les futurs textes à l’étude ( Natura 2000), on parle aussi d’un projet de « coopérative » de gestion qui regrouperait au coté des 3 communes du Captalat l’ADDU-FU et les ayants pins, qui seraient ainsi dépossédés de leurs droits ; on évoque aussi un appel à l’UNESCO.

 

Trouver une solution est d’autant plus nécessaire que les tensions se traduisent depuis quelques années par des exactions telles que des incendies ou destructions de cabanes et qu’il ne faudrait pas que ces actes, pour le moment isolés, se multiplient si la situation n’arrivait pas, sous une forme ou une autre, à se débloquer.

 

                                                       Robert AUFAN 

                                      La Teste de Buch,  Novembre 2007   

                                                        ( ?dernière mise à jour en Novembre 2012 )

 

 

Notes du Chapitre 6                    



[1] Journal officiel du 5 décembre 1985, pages 1441 et suivantes.

[2] Journal officiel des débats du Parlement, Sénat du 31 octobre 1985.

[3] Voir plus haut, lettre du 22 juillet 1986.

[4] En Janvier 2008, le maire de La teste annonçait son intention de nommer « un garde vert » pour surveiller et expliquer le massif forestier. Cette initiative louable n’a pas été réalisée !

[5] Loi N°85-565 du 22 juillet 1987.

[6] Journal Sud ouest.

[7] Journal officiel des débats de l’Assemblée Nationale :réponses des ministres aux questions écrites (31 octobre 1988, page 3096

[8] Lettres du ministre en date des 27 octobre et 22 novembre 1988

[9] Journal Sud-ouest. Compte rendu de M. Dominique Lopez.

[10] Lettre du Président du Conseil général en date du 10 mai 1989

[11] Compte rendu du 21 Mai 1990. AM La Teste.

[12] Ce fut, en ce qui me concerne, l’avant-dernière fois, puisque j’ai cessé depuis de représenter cette association, ce que je faisais depuis 1977.

[13] Lettre de l’ADDU en date du 16 novembre 1989 suite à son conseil d’administration du 14 novembre .

[14] Arrêt N° 517 D du 1 avril 1999 (audience publique).

[15] Appel N°4 du 17 octobre et appel N°5 du 11 novembre 1989

[16] AM La Teste

[17] Déclaration d’E.Broustera, adjoint au Maire. Compte rendu de la réunion du 7 octobre (archives privées)

[18] Journal Sud ouest du 11 juillet 1984

[19] Archives privées.

[20]       Id°

[21] Précisions données par le jugement du Tribunal de Grande Instance en date du 21 novembre 2006.

[22]   Id°

[23]  Photocopie d’un acte passé entre la commune de Gujan et un propriétaire le 24 octobre 1993 (archives privées)

[24]  Photocopie de l’assignation des 2 et 7 novembre 1995.

[25] Lettre d’invitation, à moi adressée, du 31 octobre.

[26] Correspondances du Maire de La teste et du Sous préfet de Novembre 1990 (archives privées)

[27] Document justificatif de l’ADDU-FU en date du 8 Février 1994

[28]  AM La Teste

[29] Carte du SDAU arrêté par délibération du SIBA le 10 juillet 1992. AM La Teste.

[99]  AM La Teste

[100]  Journal officiel N°149 du 29 juin 1994

[32] Lettre du 23 janvier 1995

[33]  Lettre et note du 23 juin 1997

[34]  Réponse du Préfet 30 octobre 1997. AM La Teste.

[35] PV de la réunion du 13 novembre 1997. AM La Teste

[36] Voir plus loin en ce qui concerne cette association.

[37]  Lettre du 5 septembre 1997.

[38]  Lettre du 23 Janvier 1998.

[39]  Notes des 14 et 15 mars 1998.

[40]  Lettre du 14 mars 1998.

[41] Documents Pro Silva

[42]  Réunion du 24 mars 1998.

[43]  Lettre et dossier du 15 mai 1998

[44] On verra dans la conclusion  que désormais ce type de forêt et ces techniques ont droit de cité dans le Schéma régional de gestion forestière des forêts privées adopté en 2006.

[45] Archives privées.

[46] Journal Sud-ouest du 11 janvier 2002

[47] «             «      des 18 et 20 février 2002

48    Lettre du 26 février 2002 publiée sur le site internet des « Verts bassin d’Arcachon »

 

[49] Ordonnance N°2001-321 du 11 avril 2001. Journal Officiel du 14 avril 2001.

[50] AM La Teste

[51] Journal La Dépêche N° 366 du 22 mai 2003.

[52] Service Inter ministériel Régional de Défense et de Protection civile.

[53] Journal Sud-ouest du 13 Janvier 2004

[54] Appel d’offre N° 05.64604 du 28 avril 2005 modifié par le N° 05.72968. Conseil général de la Gironde

[55] Lors de leur assemblée générale de 2006, ils avaient invité les propriétaires de forêts privées sises dans le site classé.

[56] En 2001, j’avais suggéré que le tracé des anciennes pistes cyclables, dites «  pistes des facteurs » soit porté sur la carte du PLU, mais l’opposition de l’ADDU-FU fit que le Maire recula. D’après le journal Sud- ouest du 8 décembre 2001 il déclara « le règlement est le même sauf en ce qui concerne l’éventuelle réhabilitation des anciennes pistes  cyclables. Si c’est cela qui chagrine on peut le supprimer » C’est ainsi qu’elles disparurent du PLU voté

le 17.       

[57] Journal Sud-ouest du 19décembre 2005.

[58]  «                 «        des 27 et 29 décembre 2005.

[59] Lettre publiée dans le journal « Votre canton » de décembre 2005 en réponse à celle de M. Marzat du 23 Septembre

    2005.

[60]  Décret du 23 décembre 1958 et arrêté du Février 1961 (Journal Officiel).

[61]  La dune est désormais gérée par un syndicat mixte formé de représentants de la Région, du Département et de la Commune de la Teste en partenariat avec le Conservatoire du littoral. L’un des buts concerne les acquisitions foncières limitées pour le moment aux sables mais la zone de préemption représentée existe toujours sur le site du Conservatoire. Lors de l’aménagement de l’aire d’accueil la question de l’achat par le Conservatoire avait été évoquée mais repoussée pour éviter qu’il n’ait à indemniser les propriétaires dont la dune (qui leur appartenait…), en reculant, recouvrait petit à petit les parcelles.

[62]  Il y a parfois beaucoup mieux . Ainsi pouvait-on lire en juin 2007 que « la forêt usagère s’étend 

   des rives du lac de Cazaux à l’océan » !! Cette manifestation d’incompétence se trouvait sur le 

    site officiel de la…mairie de La Teste. !

[63] Soumis à enquête publique au mois d’Août 2007.

[64] Il faut rappeler les mesures dont il a été successivement l’objet : espace boisé classé à conserver, site inscrit, site classé, site Natura 2000. Les deux dernières donnant de plus en plus de pouvoir aux  autorités extérieures à La Teste.

[65] Journal Sud- Ouest du 13 Décembre 2003.

[66] Journal Sud- Ouest du 13 Décembre 2003.

[67]           «            «             du 19 septembre 2006.

68          «            «              du 15 février 2006.

69          «            «               du 7 juin 2006 .

[70]           «            «                du 26 juillet 2006

[71]   Journal Sud-ouest du 21 août 2006

[72]       «            «            du 6 août 2006 citant le bulletin de l’association de protection et d’aménagement de Lège-Cap Ferret.

      Ferret.

[73]   Conseil municipal de la Teste du 31 Mai 2007.

[74]  Journal Sud-ouest du 9 octobre 2007.

[75]  Déclaration à la préfecture en date du 22 avril 2007. Numéro de parution  2007008.

[76]  Selon les propos du maire de La teste en visite sur le site, rapportés par Sud-ouest le 3 novembre 2007

[77] Ce document est consultable sur le site de la Préfecture de la Gironde :      http//www.gironde.pref.gouv.fr/politiques/dévdurable.

78 Ce document est consultable sur le site du CRPF d’Aquitaine

79 « La lettre du hérisson » N°231 d’octobre 2008 , organe de France Nature Environnement. On peut aussi le trouver sur le site de l’association  Bassin  

   d’Arcachon Ecologie .

80 Site www.foret-usagère.com infos propriétaires

81A ce propos il est intéressant de constater que Monsieur Muller, l’expert, aujourd’hui décédé, désigné en 1994 était vice-président de l’association « Pro Silva France » et figurait sur la liste établie par le Conseil National de l’Expertise Foncière Agricole et Forestière en application de la loi de 2001.

On peut consulter le site PRO SILVA sur Internet.   

82 La société Elya Suez vient ainsi d’acheter une parcelle en zone industrielle de La Teste pour installer une centrale de production énergétique alimentée aux plaquettes de bois. Outre des entreprises de la zone, cela pourrait aussi alimenter le futur hôpital (Sud Ouest du 4.12.2007).

83Journal  Sud-ouest, édition des Landes, 3 Juillet 2007, et éditions régionales des 9,12 et 19 avril 2012.et journal « La dépêche du bassin » Novembre 2012

84Il y a évidemment toujours la possibilité d’un cantonnement : mais, étant donné tout ce qui s’est passé, il est peu probable qu’une municipalité testerine soit en  mesure d’accepter un cantonnement amiable  quant à un  éventuel cantonnement judiciaire , la loi le permet toujours même si ,faute d’avoir atteint les chiffres exigés par loi, les ayant pins ont échoué dans leur dernière tentative ; mais il est de plus en plus improbable étant donné l’activisme des associations de propriétaires opposées à cette solution, dont le but est, par le regroupement des opposants ou par le rachat de parcelles, de bloquer toute procédure en empêchant d’atteindre les chiffres imposés.

Mais dans le pire des cas, le cantonnement, le problème du type de forêt à conserver et de sa gestion se posera toujours dans les mêmes termes.